Sur nos Causses, les rochers pédonculaires sont assez fréquents et intéressants à localiser. L’un d’entre eux se situant sur le Larzac se retrouve sur de nombreuses cartes postales. Celui qui nous intéresse aujourd’hui, moins connu des photographes, se trouve sur la commune de Peyreleau, il a été baptisé « Rocher du Champignon préhistorique » au XIXe siècle, par un promeneur qui le distinguant de très loin le comparait à un champignon, pétrifié depuis la nuit des temps.
Il s’agit d’un énorme rocher pédonculaire qui se dresse à une altitude de 893 mètres sur le Causse Noir. Avec une longueur de 22 mètres, c’est le plus grand de ce genre que l’on trouve, tous Causses confondus. La végétation ayant repris le dessus, et ce malgré un incendie, qui le 3 septembre 2003, avait dévoré 500 m2 à proximité du site, le rocher devient de plus en plus difficile à localiser.
Martel dans son ouvrage sur les Cévennes (1889) le définit comme suit : « un rocher tabuliforme, à demi-caché dans un bois de pins, ne tient au sol que par un mince piédestal, curieux effet de l’érosion, sous son auvent circulaire, haut de 5 ou 6 mètres, une troupe nombreuse s’abriterait à l’aise, un plaisant l’a baptisé du nom de « Champignon préhistorique ».
Une famille entière pourrait s’y abriter ou un groupe comme ici le Club Alpin Français. Nous reproduisons le menu du repas pris en 1898 par les membres de ce club durant une journée printanière à Peyreleau et cette très rare photographie, datant du même jour, le 4 juin. Elle nous démontre qu’à cette époque, le rocher du champignon était déjà un endroit prisé pour les excursions.
On peut s’y rendre en longeant les corniches qui partent de l’ermitage Saint Michel, et qui passent par le Point Sublime dominant les Gorges de la Jonte. Là, un panneau indique « le champignon » et curieusement, le mot préhistorique a été barbouillé à la peinture.
La côte est raide. Si Albert Carrière passait devant nous, il nous dirait : « On quitte le niveau des corniches et on monte, par un sentier zigzaguant dans une pinède « au champignon préhistorique », roche pédonculée dont la coupe transversale rappelle la forme d’un champignon. Il affecte la forme d’une carène penchée sur un côté et formant des surplombs de 3 mètres environ » (Notes sur les Gorges de la Jonte, Journal de l’Aveyron, 22 juin 1919).
Par sa position et sa base très évasée, il apparaît impossible de l’escalader. Autrefois, son auvent circulaire avait été transformé en bergerie.
On voyait encore il y a quelques décennies, une partie de cette construction adossée au roc. Aujourd’hui, il ne reste plus rien des murs, seuls quelques clapàs et un petit four à chaux sur la droite rappellent son existence passée.
A proximité du rocher du Champignon, repose les cendres de Jacques Rouire, spéléologue émérite (1920- 2009) qui, dans ses dernières volontés, demanda à ce que ses cendres soient mêlées au sable dolomitique du Causse (Jacques Cros-Saussol, Midi Libre, 24 mai 2010). Notons pour terminer qu’un abri au mur de façade incurvé se trouve à 300 mètres au Nord Est du Champignon préhistorique. Refuge temporaire en cas d’intempérie (d’après Alain Bouviala, les Baumes, 2002).
Marc Parguel