Causses et vallées

Les failles de Canalettes (commune de Nant)

Direction l’Hospitalet-du-Larzac, cette semaine. Après avoir traversé le village en partie, il faut prendre la route d’Egalières. Au bout d’environ 2 km, tourner peu avant la ferme et prendre un chemin forestier sur la droite qui mènera, après 20 minutes de marche aux failles des Canalettes, situées sur la gauche.

Si le chemin semble marqué, par des points bleus ou des clapàs, il ne faut pas hésiter à en sortir et se diriger vers des rochers, où l’on voit à certains endroits des profondeurs bien marquées.

Nous sommes sur la bordure orientale du Larzac et les failles naturelles qui se présentent à nous sont profondes et parallèles les unes aux autres, on en compte trois, elles ont été formées par l’érosion du calcaire d’un secteur bien déprimé que les scientifiques (Paul et Martine Ambert) nomment « le rock fan d’Egalières » qui se trouve « accidenté par des dolines encaissées qui soulignent l’action comme la permanence du façonnement crypto-karstique ».

On devrait appeler ces failles « diaclases », car « la notion de faille sous-entend un déplacement des couches ou strates qui se trouvant au départ en vis-à-vis, après « séisme » ou pression ne sont plus au même niveau, elles sont décalées par un affaissement, ce qui n’est pas le cas aux Canalettes » (Alain Bouviala).

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C’est dans ces lieux que l’homme de la préhistoire à l’abri d’auvents rocheux a vécu, chassant le cheval sauvage et le cerf. Le site des Canalettes montre que le plateau du Larzac a été occupé de manière répétitive, du moins pendant les périodes tempérées. Au-delà de ces failles, on peut remarquer quelques arches souterraines ainsi qu’une source.

En parcourant ces canoles, on peut penser alors à ce qu’écrivait en 1797, L.C.P. Bosc dans son ouvrage « Mémoires pour servir à l’histoire du Rouergue » : « L’intérieur de ces grottes profondes, par lesquelles on semble pénétrer dans les entrailles de la Terre, pour lui dérober les secrets mystérieux de la végétation, ou pour contempler les routes cachées des fontaines et des ruisseaux… On ne craindrait pas de s’enfoncer sous ces voutes obscures, de franchir ces passages étroits et resserrés, après lesquels on se trouve tout d’un coup, tantôt près d’un vaste réservoir d’eau, tantôt sur les bords d’un abime profond, dont on entend retentir au loin les cavités ; tantôt dans une salle immense, lambrissée de pétrifications et de stalactites variées à l’infini ».

Il n’existe pas, à ma connaissance, sur le Larzac, d’autres endroits où l’on peut se faufiler sous terre, à ciel ouvert comme ici. Sur le Causse Noir, dans le secteur de Longuiers, au Sud-est de ce hameau, il existe quelques alignements de failles appelées failles de Gaubernat de 3 à 5 mètres de profondeur, sur des largeurs de 5 à 6 mètres, mais rien de comparable aux Canalettes.

Proche des failles, l’abri du même nom, à 680 mètres d’altitude, est un large auvent de 4 mètres de haut, couvrant une surface d’environ 60 m2. Découvert en 1964, un premier sondage par Georges Constantini et Jean Maury révéla une stratigraphie de 2,20 mètres d’épaisseur appartenant dans sa totalité au paléolithique moyen (- 70 000 à – 30 000 ans). Un programme de fouilles décidé en 1979 a été réalisé de 1980 à 1986 sous la direction de Liliane Meignen. L’abri était occupé au printemps été, et même en début d’automne par les chasseurs moustériens.

Des activités de boucherie étaient effectuées dans cet habitat. La configuration des failles des Canalettes situées à proximité de l’abri laisse penser qu’ils utilisaient ces failles pour piéger les animaux sauvages. Des ossements d’animaux ont été découverts et reposent au Musée de Millau. Il s’agit principalement d’ossements de chevaux, ours, rhinocéros, hyènes, cerfs et lapins… De plus, des pointes, des racloirs utilisés par ces chasseurs ont aussi été mis à jour.

Marc Parguel

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