Causses et vallées
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Au Roc Pounchut, en souvenir de Frère Guy  (1930-1989)

Il y a 35 ans, le 15 avril 1989, nous quittait Guy Tarrisse plus connu comme « Frère Guy ». Son décès accidentel avait ému de nombreux Millavois tant il était  connu et aimé dans le monde de la musique, et de la randonnée. Hommage à ce merveilleux professeur de musique de mon enfance.

Direction le Causse du Larzac, vers le chaos ruiniforme de Potensac. En contrebas des rochers se voit le roc Pounchut (le roc pointu). C’est vers celui-ci que nous dirigerons nos pas cette semaine.  Une pierre accolée au rocher rappelle au souvenir de mon professeur de musique, lorsque j’étais enfant, Frère Guy Tarrisse.

Guy Joseph Tarrisse était né le 20 juin 1930 à Puissalicon, à 15 km de Béziers dans l’Hérault. Il avait une passion, la musique. Il avait remplacé M. Chibaudel à la direction de la chorale Emma Calvé, il occupait notamment un poste de professeur de flûte à bec et de percussions au sein de l’école de musique municipale.

J’ai eu la grande chance de le connaître lorsque j’étais élève à l’école de Marguerite-Marie du CP au CE2, de 1987 à 1989, il a su comme aucun autre professeur me transmettre sa passion pour la musique. Il nous apprenait des chansons dont les textes évoluaient en fonction de notre âge, je me souviens des titres : Mon perroquet, richesse de l’automne, Noël bleu, Noël blanc, flocon papillon, petit Arlequin, la bagatelle… ou encore Nagouika que vous pourrez écouter dans cette chronique. J’ai choisi cette chanson, car elle nous permet d’entendre la voix de Frère Guy.

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Titre audio Nagawicka extrait d’une cassette audio (1987)

Ce titre, comme toutes les chansons qu’il nous apprenait, il les enregistrait sur des cassettes. Mais pour cela il devait sélectionner les meilleures voix. Aussi, je m’appliquais du mieux que je pouvais pour figurer sur l’enregistrement. Chaque école où il enseignait enregistrait une chanson. Et à la fin de l’année, il arrivait avec sa valise pleine de « cassettes magiques ».

Pourquoi magique ? Parce qu’enregistrées avec un matériel stéréophonique, il isolait les voix des enfants sur une piste et l’autre piste était instrumentale. Ensuite il mixait le tout chez lui. Bien que le procédé soit connu, il maintenait que ces cassettes de 30 minutes étaient magiques, car enregistré en « duoplay ». On pouvait donc continuer à chanter sur la piste instrumentale chez soi. Comme il nous fournissait sur des feuilles polycopiées les paroles des chansons, on avait tous les éléments en main pour faire du karaoké à la maison.

Curieux, je lui demandais comment il faisait pour enregistrer sur deux pistes différentes, il me répondait avec un clin d’œil « c’est un secret ». Il aura fait chanter de nombreux enfants  des élèves des classes primaires (CP à CM2) de nos écoles libres de Millau et des environs, Sacré-Cœur, Lauriers-Roses, Marguerite Marie, Sainte-Marie, Compeyre, Creissels, Saint-Georges de Luzençon, et Roquefort, et enregistra de nombreuses cassettes, je n’en ai que deux puisque nos chemins devaient se séparer avec sa disparition un sombre jour d’avril 1989, mais je serai bien curieux de connaître toutes les autres chansons qu’il avait enseignées, si quelqu’un a chez lui encore une de ces cassettes !

Le roc Pounchut (DR)

Il avait aussi deux autres passions : la randonnée et la photo. Cette dernière lui fut fatale. Samedi 15 avril, il partit sur le Larzac pour prendre quelques clichés, et c’est ici sur le roc Pounchut que Frère Guy était monté. Le soir du 15 avril, il ne rentrait pas. Le lendemain non plus.

Les heures s’écoulèrent et l’inquiétude devenait de plus en plus grande. Si je me souviens bien, le lundi 17 avril alors que nous l’attendions en classe pour notre cours de musique, on nous avait dit que Frère Guy était monté sur le Causse mais il n’avait dit à personne où il était parti précisément. Ce même jour, les gendarmes de la Cavalerie avaient remarqué un cyclomoteur stationné au bord de la Nationale 9, non loin du Rajal-del-Gorp. C’était le sien. Le soir même, les gendarmes, leur chien, mais aussi de nombreux parents d’élèves partaient à sa recherche. Ils le retrouvèrent sans vie au pied du « Roc Pounchut ». Sur ce rocher, où il était parti faire des photos le samedi après-midi, un faux pas lui fit faire une chute de cinq mètres environ, hélas mortelle.

Frère Guy était âgé de 58 ans (DR)

Âgé de 58 ans, dont 41 de profession religieuse consacrée à l’éducation des jeunes, il était très aimé de tous ses élèves. Ses obsèques ont eu lieu le jeudi 20 avril 1989, à l’église Saint-François de Millau et il repose depuis au cimetière de Béziers (Fonseranes).

Quelque temps après sa disparition, ses amis du Bartas placèrent une plaque en sa mémoire sur le roc Pounchut au pied duquel Frère Guy nous avait quittés pour toujours.

Marc PARGUEL

Une plaque en sa mémoire (DR)

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