Causses et vallées

Au lieu-dit La Mouline (commune de Millau)

Cette semaine, nous dirigerons nos pas dans la proche banlieue de Millau, entre Massebiau et le Monna. C’est au bord de la route départementale 991, au lieu-dit « la Mouline », que nous nous arrêterons, à cinq kilomètres de Millau. Ici, en aval du Monna, jaillit au niveau de la route, une source pérenne, à gros débit (10 litres/minutes) qui fait le bonheur de nombreux automobilistes qui viennent se ravitailler, n’hésitant pas à remplir leurs jerricanes.

D’une fraîcheur incontestable, elle a fait, selon un habitant du Monna, de jolis centenaires. Son bassin d’alimentation se trouve à la Pouncho d’Agast, un secteur dépourvu de culture agricole.

La source continue son chemin, et arrose des petits jardins sous la route. Le lieu s’appelle « La Mouline » (la forme ancienne molnar : moulin, aurait donné le Monna, molnar, ou molinar : moudre, donnerait la Mouline). « Molnar » devait rester attaché à toutes les terres de la vallée qui s’étendent au-dessous de Pépissou, jusqu’au Monna.

Le nouveau cadastre de l’année 1970 garde souvenance du fait et nomme « la Moulina » tout ce tènement. Selon Raymond Robert : « Erigé sur un à-pic dominant le terroir de la Mouline, tout laisse croire que, comme bien d’autres constructions de ce genre, la forteresse de Pépissou possédait son propre moulin. On apercevait jadis, au-dessous du château, sur le rivage de la Dourbie, d’antiques murs, qui auraient pu être les ruines d’un moulin ayant fonctionné à cet endroit ? La question reste pour l’instant sans réponse, aucun document ne venant confirmer ni infirmer cette supposition. Toutefois l’emplacement semble bien convenir pour y installer une usine, facilement alimentée par une dérivation des eaux de la rivière ; les innombrables fortes crues ont fait tout disparaître. » (Les Moulins de Millau, 1993).

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Henri Parguel m’a affirmé que les habitants du Monna appelaient aussi cette fontaine « la source de Raoulet » : « On l’appelait ainsi, car c’était la source de Raoul. Il y avait des laïsses au-dessus où on gardait des chèvres, ça penchait. On ne tenait pas debout. » (Entretien au Monna, 2 février 2016).

La route au bord de laquelle jaillit cette source à été décrite voilà 168 ans par Argeliez : « Je parcourus d’abord une plaine assez étendue ; mais bientôt je m’enfonçai dans une gorge dont le fond est entièrement occupé par la Dourbie, qui roule en murmurant, ses eaux limpides, au milieu d’une double bordure de peupliers, de saules et de clématites. Quelques lambeaux de terre sont livrés à la culture. Tout le reste ne présente que des coteaux escarpés où croissent seulement le chêne et le buis ; ou bien, ce ne sont que de vastes précipices, dont les revêtements, formés d’énormes rochers à figure cubique ou pyramidale, offrent de loin le spectacle lugubre de tours antiques et de châteaux en ruines. Le premier effet de cette illusion est d’abord un sentiment d’effroi ; mais bientôt le moyen âge vous apparaît avec tout ce qu’il a laissé de charmes lointains et poétiques : l’aimable chevalerie, ses hauts faits, sa galanterie, les gracieux troubadours, les gentils ménestrels… » (Souvenirs d’un voyage au Monna, L’Echo de la Dourbie, 29 janvier 1843).

La source de la Mouline fait aussi le bonheur des cyclistes et des coureurs !

En faisant quelques pas de plus, Pierre-Edmond Vivier nous apprendrait que c’est là que le journal de l’époque « L’écho de la Dourbie » (1841-1871) à pris son nom : « Il y a un écho, bien net, à la hauteur du grand tournant qui précède l’entrée du village du Monna, écho produit par une grande paroi rocheuse située en face de là, sur l’autre rive. En cet endroit, entre la route et la rivière est une prairie très propre aux pique-niques et fêtes champêtres. Je ne connais pas d’autre écho dans cette vallée, à une distance permettant de s’y rendre à pied, en bandes. » (P.-E.Vivier, Notes de la vie millavoise, cahier 1, Société d’Etudes Millavoises).

Marc Parguel

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