Après le départ forcé d’un médecin du service de psychiatrie de l’hôpital de Millau, la situation s’est très vitre dégradée en sud Aveyron, au point de presque mettre le service à l’arrêt. Il a donc fallu réagir très vite pour maintenir l’offre de psychiatrie et surtout ne pas laisser les patients sans soins et pouvoir répondre à l’urgence le cas échéant. La maire de Millau Emmanuelle Gazel a souhaité ce jeudi 6 juin faire un point sur la situation, mais aussi préciser sa position.
Le contexte
Il y a quelques jours, le docteur Turky, médecin « padhue » (praticiens à diplôme hors Union européenne) était contraint de quitter le service de psychiatrie dans lequel il exerçait depuis 18 mois. Sur décision préfectorale, il s’est vu obligé quitter le territoire français le 31 mai, la préfecture appliquant à la lettre la loi en vigueur, faisant fi de la forte mobilisation engendrée par cette affaire et des demandes répétées de certains élus et du service de psychiatrie qui fonctionnait déjà en service restreint.
Cette décision d’Etat, a provoqué le départ du docteur Turky et, effet papillon, l’arrêt maladie du docteur Jean Dominique Gonzalès, chef de pôle qui confiait « être à bout de cette situation ». Sans sa supervision, impossible pour un médecin « Padhue » d’exercer. Le service de psychiatrie du sud Aveyron s’est trouvé dans une situation inédite avec une file active annuelle de 1400 patients potentiellement sans médecin.
Solidaire
Emmanuelle Gazel a tenu à exprimer « toute sa solidarité à l’ensemble du personnel soignant, des patients et leurs familles qui se retrouvent dans une situation inquiétante ». « Je veux leur dire qu’on est mobilisés à leurs côtés dans ce contexte anxiogène pour eux », a rappelé la maire en pointant immédiatement du doigt « 40 % de postes de psychiatres non pourvus au niveau national » et plus localement cinq postes ouverts en sud Aveyron, dont deux vacants depuis plusieurs années. Elle avait d’ailleurs dès le 23 avril rédigé un courrier pour défendre le cas du docteur Turky, « pour soutenir sa situation administrative, bien que hors la loi, dans le but qu‘elle soit analysée avec discernement et humanité ». Elle n’a pas été entendue.
« Ce qui me choque, c’est le sacré décalage entre les discours politiques du président et du Premier ministre qui disaient qu’ils allaient régulariser les médecins étrangers, et l’application stricte de la loi faite par les services de l’État, le préfet en l’occurrence » s’agace le premier adjoint Michel Durand.
Défendre le service de psychiatrie du sud Aveyron
L’édile a ensuite expliqué qu’une cellule de crise avait été déclenchée dès vendredi soir dernier, pour « pouvoir trouver des solutions et ne pas laisser le sud Aveyron sans accompagnement psychiatrique ». Ce sont donc, le docteur Hadrich, qui exerce en libéral, Jacob, et des médecins de l’hôpital Sainte-Marie de Rodez qui assureront par intérim la supervision du service. Pour autant pas question d’envisager une alliance départementale à moyen ou long terme, même si ce pourrait être le spectre qui plane sur le sud Aveyron, déjà dénoncé par le docteur Jean-Dominique Gonzalès, face au silence de l’ARS qui avait pourtant le pouvoir de maintenir le médecin poste.
Pour l’équipe municipale, sa posture est sans équivoque et elle a déjà été précisée à l’ARS « nous ne voulons pas être associés à ces choix-là, sur ce dossier, il nous semble que les pouvoirs publics ne veulent pas privilégier l’intérêt général. Nous, nous sommes élus pour en être garants au quotidien. Nous rappelons l’importance de ce service de psychiatrie à l’échelle du sud Aveyron, c’est en proximité qu’on agit. Les collaborations avec les uns et les autres sont toujours bonnes à prendre, et je remercie Sainte-Marie, mais cela ne veut pas dire d’accord pour fusionner un service au niveau départemental, nous allons défendre le service public de psychiatrie sud aveyronnais », affirme Emmanuelle Gazel avant d’ajouter que « ni la maire de Millau ni la présidente du Conseil de Surveillance de l’hôpital ne fera ce choix ».
Rester mobilisés
La pénurie de médecins psychiatres et le recours aux médecins Padhues ne sont pas une exclusivité aveyronnaise, l’enjeu maintenant sera de trouver des solutions pérennes localement et au niveau national. Même si c’est encore loin d’être le cas, la maire de Millau s’est voulue rassurante sur la situation de la patientèle, elle affirme « qu’avec cette solution, bien que précaire, tous les patients pourront continuer à voir un médecin et à être suivis ». Elle en appelle à tous ceux qui voudraient venir « renforcer les équipes en sud Aveyron » et assure « mettre les bouchées doubles sur les besoins de recrutement dans l’espoir d’avoir au moins deux médecins permanents pour superviser les médecins padhues ».
Dans les prochains jours, un courrier sera envoyé au Premier ministre pour l’alerter sur cette situation « problématique de santé, mais aussi de sécurité publique », précise la maire qui répète, « on continuera de rester mobilisés ».