Opinion

Opinion. Camarades agriculteurs, les têtes dirigeantes de la FNSEA nous marchent dessus

« Ces dernières semaines, les agriculteurs ont une nouvelle fois démontré de manière spectaculaire leur capacité de mobilisation collective. Comment ne pas être d’accord avec le sens de ces panneaux retournés partout en France, d’Arras à Rodez, disant « on marche sur la tête » ?

Nous, paysans et paysannes, vivons des temps difficiles. Quand les retards des aides PAC et la difficulté de se dégager un revenu se cumulent, comment accepter que le gouvernement français signe un nouvel accord de libre-échange avec la Nouvelle-Zélande, qui exacerbera la concurrence déloyale des productions étrangères ?

De cette colère, découlent parfois des actions musclées, qui peuvent être nécessaires pour se faire entendre. S’il nous faut veiller à ne pas dégrader les biens et l’espace publics, qui nous sont communs, il est compréhensible que des institutions étatiques ou agricoles (les caisses de MSA) suscitent du ressentiment.

En effet, ces institutions sont dirigées par l’État et les syndicats agricoles majoritaires, FNSEA et JA, cogérant de l’agriculture française depuis quasiment soixante-dix ans et de fait co-responsables dans le même temps de la disparition de 7 millions d’agriculteurs (nous sommes aujourd’hui 400 000).

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La FNSEA dirige la quasi-totalité des caisses de la MSA, dégradées ces derniers jours à Orthez ou Pau. La « Fédé » contrôle également 84 des 89 chambres d’agriculture départementales, elle est à la tête de toutes les interprofessions agricoles, qui dictent la politique française dans les différentes productions.

Spécialistes du double jeu, la FNSEA et les JA se présentent dans le même temps comme les défenseurs des agriculteurs.

« On marche sur la tête ». En réalité, ce sont les têtes dirigeantes des syndicats majoritaires qui nous marchent dessus. Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, est à la tête du groupe avril, anciennement Sofiprotéol, 4e groupe agroalimentaire français (9 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2023). Sa spécialité : les oléagineux-protéagineux. Xavier Beulin, ancien président de la FNSEA et de Sofiprotéol lui aussi, avait obtenu de l’État il y a quelques années que 15 % de colza aille dans le GNR utilisé par les agriculteurs. Et on voudrait nous faire croire que la FNSEA ne peut rien contre la fin de l’exonération fiscale du gazole non routier, une des sources de la colère actuelle ?

Les Jeunes Agriculteurs dénoncent à juste titre le nouvel accord de libre-échange conclu avec la Nouvelle-Zélande. Mais faut-il rappeler que l’arrivée de produits concurrentiels sur le marché français est le fruit d’une politique de libre-échangisme construite par l’OMC et soutenue par la FNSEA depuis les années 90 ? Parlons également des éleveurs, à qui le prix du lait n’arrive pas à dégager de revenu. Qui a négocié la fin des quotas, à l’origine de cette situation ?

La FNSEA, encore elle.

« Pas de transition sous pression » était un autre slogan des JA ces derniers jours.

Malheureusement, la crise écologique et climatique dont tout le monde prend conscience aujourd’hui est bien là. Il nous faut être réalistes : nous sommes soumis à la pression naturelle du climat et aux limites des ressources. Produire toujours plus, sans prendre la juste mesure de la mondialisation ou du changement climatique, comme le propose la FNSEA-JA n’aboutira qu’à la fragilisation des exploitations et des filières.

Il n’y aura pas de solutions aux problèmes sociaux et environnementaux sans une transformation radicale du modèle économique actuel. La lutte contre l’agro-industrie et la FNSEA qui la sert doit s’intensifier.

À la Confédération paysanne, nous travaillons au quotidien pour un véritable revenu des paysans, issu du fruit de leur travail, car il est indispensable à une vie digne et à la transition agroécologique.

Nous proposons de maîtriser les productions en fonction des besoins de nos concitoyens, pour nous connecter réellement à nos territoires, vers une authentique souveraineté alimentaire.

La Confédération paysanne vient d’obtenir du gouvernement une rallonge de 34 millions d’euros pour aider les paysans à mettre en place des mesures agroenvironnementales et climatiques.

Notre rôle de paysans et paysannes est de nourrir la population. Cela ne peut se faire qu’en permettant à toutes et tous de vivre de notre métier et d’installer des agriculteurs dans nos campagnes.

Paysannes, paysans de tous les départements, unissons-nous ! »

La Confédération Paysanne de l’Aveyron 

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Article original publié sur Ruthénois.com

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