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Millau. « Osons penser que nous allons gagner ! »

Un mouvement inédit se produit actuellement en France, une centaine de lieux sont occupés sur les mêmes bases de revendications communes. Depuis l’initiative des camarades occupants de l’Odéon, d’initier un mouvement de lutte pour des droits sociaux le 4 mars 2021, nous nous retrouvons ce dimanche 28 mars avec 97 lieux occupés.

Ces lieux, pour la plupart, sont des lieux de spectacles. Mais ne vous y trompez pas, ce mouvement, malgré celui auquel ils voudraient le cantonner, n’est pas le mouvement seulement des intermittents du spectacle et du secteur culturel.

Bien évidemment, il y a des personnes du secteur culturel, mais ce sont aussi des personnes désireuses de défendre des droits pour tout un pan de la société qui, déjà fragilisé avant la crise sanitaire, tombe actuellement dans l’extrême précarité.

Ce sont donc aussi tous ces intermittents de l’emploi qui enchaînent contrats courts et périodes de non-emploi (CDD, CDDU, intérim, extra, autoentrepreneurs, auteurs….). Ce sont aussi toutes ces personnes qui pensent qu’une société plus juste et solidaire doit voir le jour. Ce sont toutes ces personnes qui pensent intérêt collectif plutôt que société individuelle et repli sur soi. Ce sont toutes ces personnes qui repensent des façons d’interagir ensemble.

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Nous en sommes arrivés à ces actions d’occupations, car nous n’avons plus le choix. Nous ne le faisons pas par plaisir, mais par nécessité et volonté de faire cause commune avec tous les précaires. Nous ne pouvons accepter cette nouvelle réforme d’assurance chômage qui va encore une fois fragiliser les plus faibles alors que l’on balance des milliards aux entreprises du Cac 40.

Nous ne pouvons voir nos caisses de sécurité sociale (maladie, maternité, formation…) affaiblies faute de cotisations des salariés empêchés de travailler depuis le début de la crise sanitaire. Nous ne pouvons accepter que des intermittents de l’emploi basculent au RSA faute de prolongations de leurs droits. Nous ne pouvons accepter une non-prolongation de l’année blanche pour les intermittents du spectacle au-delà du 31 août 2021, car grand nombre d’entre eux n’auront pas effectué leurs heures pour le renouvellement.

Nous ne pouvons accepter une réouverture des lieux sans droits sociaux, car cela mettrait en concurrence les travailleurs du spectacle. En clair nous ne pouvons accepter, au 21e siècle, que l’on fasse payer la crise aux plus pauvres alors qu’on arrose par milliards les responsables du désastre.

De ce qui est de notre principale revendication, l’abrogation de la réforme de l’assurance chômage, ce n’est pas uniquement ce qu’elle contient comme mesure néfaste qui nous fait agir, mais surtout ce que représente celle-ci dans leur calendrier de casse.

Nous savons déjà qu’après sa mise en application le 1er juillet, ce sera, courant 2022, le tour du régime chômage des intermittents du spectacle et des annexes spécifiques, et puis celui du Code du travail, de nos droits et libertés dans son ensemble.

Il y a derrière tout ça une volonté de la part du patronat et du gouvernement d’une casse de la solidarité interprofessionnelle. En clair, ils ne veulent plus de la contrepartie sociale que nous leur avons imposée par la lutte face à la flexibilité qu’ils exigent. Dans leur monde idéal ils nous voudraient flexibles et sans droits, une sorte d’Uberisation généralisé.

C’est donc pour cela que nuit et jour nous occupons des lieux de spectacles, afin de mettre en lumière cette volonté manifeste de nous stigmatiser et de nous asservir à leur système mortifère. Ces lieux, nous sommes en train de les transformer en lieu de débats et de réflexions où chacune et chacun à sa place.

Nous les transformons en véritable maison du peuple. Nous repensons le monde, notre société, nos façons de faire.

Alors oui malgré cette centaine de lieux de culture occupés nous sommes encore trop peu nombreux, car ce qui se joue en ce moment est grave, mais aussi historique.

Car tous les précaires de tous les secteurs confondus, jeunes, retraités, salariés ou non se retrouvent. Nous voulons défendre nos droits, mais surtout en conquérir de nouveaux. Osons penser créer des droits attachés à la personne et non au travail.

Ces droits attachés à la personne de sa naissance à sa mort seraient une formidable clé de transformation de la société et de notre façon de nous y impliquer dans celle-ci.

Alors oui je pense sincèrement et honnêtement qu’il est possible de défendre nos droits et d’en conquérir d’autres. Une convergence inédite est en train de se réaliser. NOUS POUVONS GAGNER !

Mais pour pouvoir gagner, vous ne pouvez pas compter uniquement sur celles et ceux qui sont impliqués dans le mouvement, car nos gouvernants restent sourds et accélèrent leur sale besogne de casse.

C’est pourquoi nous vous appelons partout où c’est possible, de la façon dont vous pouvez vous impliquer à nous rejoindre. Car si nous sommes forts ils seront obligés de plier.

Ne nous laissez pas gagner tout seul !

Ce que nous défendons, nous le défendons pour toutes et tous !

Benoit Sanchez-Mateo,

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