Politique

Millau. Alain Fauconnier dénonce des « propos scandaleux » tenus lors du conseil municipal

La décision a failli passer inaperçue. Hier soir, à l’occasion du conseil municipal, l’adjoint aux finances, Daniel Diaz, a donné lecture d’un projet de délibération concernant une décision budgétaire modificative. Au milieu d’un long tableau de chiffres listant toutes les modifications, des chiffres souvent revus à la hausse, un nombre négatif : 54.697 euros qui ont été retirés du budget. La cause ? L’annulation de la création d’un pump track à côté du skate park.

Un pump track, c’est un parcours en boucle, composé de bosses et de virages qui permettent aux pratiquants de gagner de la vitesse sans donner un seul coup de pédale. Le principe est simple : on allège le vélo à l’approche d’une bosse, et on pousse dès qu’on aborde une descente : on « pompe » sur la piste, ce qui en anglais donne « pump track ».
Avec l’apport d’une solution en enrobé, comme sur les routes, le spectre des pratiques ne reste plus uniquement réservé aux VTT et BMX, il devient possible de la parcourir à rollers, skate ou même à trottinette.

La mise en service devait avoir lieu en septembre 2019

La création d’un tel équipement était à l’étude fin 2018, en collaboration avec le CSO Millau. L’installation aurait servi au CSO Millau, mais aussi aux scolaires, aux centres de loisirs, à la MJC…

Des contacts ont été pris et un tour de table a été effectué auprès de partenaires financiers. La Ville a alors sollicité ceux qui l’avaient accompagnée pour la réalisation du bowl (l’un des modules du Skate Park) en 2016/2017 : les Fonds Européens (en particulier le programme Leader, géré localement par le Parc des Grands Causses, NDLR) à hauteur de 40 %, la région Occitanie (10 %), le Département (Dispositif Agir pour le Territoire, 10 %), la Communauté de communes Millau Grands Causses (partenariat nécessaire pour obtenir les fonds européens, 10 %), les 30 % restant étant à la charge de la Ville de Millau.

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Le budget a été voté et les travaux devaient être réalisés au printemps pour une mise en service au plus tard en septembre 2019.

Le pump track de Saint-Affrique, qui a coûté 134.440 € HT, a bénéficié des aides de la Région, de l’Europe et de la Communauté de communes du Saint-Affricain. (Photo : © Benoît Garret)

« La ligne rouge a été franchie »

Hier soir donc, la décision budgétaire modificative allait passer comme une lettre à la Poste. Jusqu’à ce qu’Emmanuelle Gazel, conseillère municipale d’opposition, s’étonne de l’abandon du projet. « Encore une promesse non tenue », a-t-elle lancé.

Bernard Soulié, conseiller municipal adjoint aux sports, se défend alors dans des propos peu audibles, le micro n’étant pas branché. En clair, le projet de pump track serait abandonné parce que le Parc des Grands Causses (présidé par le maire de Saint-Affrique Alain Fauconnier, NDLR) aurait préféré financer celui de Saint-Affrique. Fin des débats, et place à la délibération suivante.

L’histoire du projet mort-né de pump track millavois aurait pu en rester là, mais il se trouve que la petite explication de Bernard Soulié est remontée – on ne sait comment – aux oreilles d’Alain Fauconnier, qui, ce matin dans les locaux du Parc des Grands Causses, a tenu à manifester son mécontentement auprès de la presse.

« Les propos tenus à l’égard du Parc sont de fieffés mensonges et là, trop c’est trop, a-t-il pesté. Des fois, j’ai la couenne épaisse, je laisse glisser, j’essaie d’éviter les polémiques inutiles, mais là, la ligne rouge a été franchie. »

« C’est absolument scandaleux ! »

« Hier, au conseil municipal de Millau, le maire de Millau a annulé une opération de pump track qu’ils avaient prévu de faire. Il a été dit que c’était le Parc qui ne finançait pas, ils retiraient ce dossier parce que le Parc avait financé Saint-Affrique et ne finançait pas Millau. Ça, c’est un mensonge éhonté, c’est absolument scandaleux ! », a déclaré le président au Parc.

Avant d’expliquer que le pump track de Saint-Affrique a été réalisé en 2017, et que si Millau souhaitait faire un pump track, « c’est très bien, ça évitera aux Millavois de venir à Saint-Affrique ».

Et de donner sa version : « Le Parc a même donné aux services de Millau la trame du dossier de Saint-Affrique pour qu’ils voient les proportions, les financements… Ce n’est pas la peine d’aller inventer la poudre quand ça a été fait. Il n’y a eu aucun problème. Simplement, le dossier a été déposé, et jamais le Parc n’a été sollicité pour le finaliser. Alors je ne sais pas pourquoi, il faut demander aux Millavois, mais aller dire que le Parc avait dépensé l’argent à Saint-Affrique et qu’il n’y avait plus d’argent pour Millau, c’est une honte, c’est une honte ! »

Alain Fauconnier ne compte pas en rester là. « Je souhaite clairement qu’un rectificatif soit fait par le maire de Millau. Je ferai d’ailleurs une correspondance dans ce sens, pour dire qu’on peut se tromper des fois c’est clair, mais quand on se trompe on le reconnait. Nous avons toujours été disponibles sur les dossiers de Millau. Il y a des raisons probablement qui font que ce dossier a été retiré, mais il n’est pas acceptable de dire qu’il est retiré parce que le Parc refusait de le financer. Aujourd’hui, s’ils déposent un dossier, il n’y a aucun problème, il sera financé. Ils ont juste décidé de ne pas faire ce pump track. »

La Ville de Millau reconnait « une erreur »

Contactée par Millavois.com, la Ville de Millau admet « une erreur » de cible.

Les propos qui ont été tenus sont bons sur le principe, mais il ne s’agit pas en effet d’un problème avec le Parc Régional des Grands Causses mais avec la Communauté de communes. La Communauté de communes nous a fait savoir qu’elle ne pouvait pas participer au projet, parce que c’était un projet plus sportif que touristique. Et comme la subvention de l’Europe est conditionnée à la participation de la Communauté de communes, nous avons préféré abandonner. »

Deux questions se posent alors : pourquoi la réalisation du bowl en 2017, installation tout aussi sportive que le pump track, a reçu des subventions de la Communauté de communes et donc de l’Europe ? Et pourquoi le pump track de Saint-Affrique a, quant à lui, reçu des aides de la Communauté de communes du Saint-Affricain, Roquefort, Sept Vallons ?

L’explication d’Hugues Richard…

Hugues Richard, l’ancien l’adjoint aux sports (il a démissionné début janvier 2019, NDLR), a sa petite idée sur la question. « La décision de construire ce pump track a été prise après l’élection, elle ne faisait pas partie du plan de mandat, assure-t-il. On l’a mise sur la table en 2016, en 2017, en 2018… Pendant trois ans, que ce soit le Parc des Grands Causses ou la Communauté de communes, on nous a octroyé toutes les subventions demandées, mais le maire repoussait toujours à l’année suivante. Que ce soient le Conseil départemental, le Parc des Grands causses ou la Communauté de communes, ils nous ont toujours suivi sur ce petit projet. Tout le monde a mis la main à la pâte, mais c’est la Ville de Millau qui, chaque année, ne débloquait pas les fonds. Alors au bout d’un moment, tu en as marre. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui ont poussé à ma démission. Il espérait avoir assez d’argent avant les prochaines élections, mais il a donné la priorité à d’autres projets… »

… et celle de Patrick Roméro

C’est dommage de faire des jolis quais et de ne pas faire des choses pour nos enfants.

Patrick Roméro, ancien président du CSO Millau, ne cache pas non plus sa frustration. « C’est triste, c’est du gâchis, ce n’était vraiment pas un investissement énorme. Le Parc des Grands Causses était intéressé, notamment dans le cadre du fameux Pôle Nature que l’on attend encore… Et la création de ce pump track n’allait pas du tout à l’encontre des professionnels des sports nature comme Duverbike ou Roc & Canyon, au contraire. Des villes comme Mende ou Saint-Affrique ont ce genre de structure, et nous, capitale de la pleine nature, on n’est pas capables d’avoir un petit pump track. Avec la pleine nature, on a de l’or à Millau, mais on marche à l’envers. C’est dommage de faire de jolis quais et de ne pas faire des choses pour nos enfants. Le monde associatif a besoin de ça, regardez, Marine Cabirou, Rudy Cabirou, Dylan Levesque, ce sont des jeunes qui viennent de l’associatif. »

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