Causses et vallées

Paquette, la chèvre du Monna

En ce début de printemps, allons au Monna, petit village situé à six kilomètres de Millau, dans la vallée de la Dourbie. En remontant la rue principale, en haut du village, après avoir dépassé le cimetière, on marche sur le sentier des Anes.

A l’abandon, sur la droite du chemin, on remarque les vestiges (435 mètres) d’une canalisation. Des sourcettes et des eaux de ruissellement sur les roches à nu du ravin, se rassemblaient au lieu-dit « les Fontanilles » ou « fontanelles » (petites fontaines) et constituaient la première adduction desservant le Monna. C’est dans ces lieux que se déroula l’histoire que nous allons évoquer aujourd’hui.

Sur le sentier des ânes, Ravin du Monna.

Cette histoire, pourrait être celle de Monsieur Seguin et de sa chèvre désobéissante, mais celle-ci a une fin plus heureuse que le récit conté par Alphonse Daudet. Les faits se passent en 1947. André Robert, père de Raymond (à qui nous devons cette lettre), écrit que leur chèvre leur a joué un heureux tour, mais je n’en dirai pas plus… Voici la copie du courrier qu’il lui envoie :

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Le Monna,
Le 20 mai 1947

Bien chers enfants,

Il faut que je vous dise que Paquette notre brave chèvre nous a fait cette année deux superbes chevrettes et Maman à l’intention d’en garder une. Elles sont nées dans les pins tout au bout des Fontannelles mercredi passé. Maman était descendue à Millau, et comme le moment approchait de voir le jour, je descends à l’écurie pour la voir.

Elle fit comme si elle voulait sortir. Je lui ouvre la porte et la laisse aller au dehors du jardin. Elle va jusqu’à l’écurie de Fabre (aujourd’hui de Causse), et tout d’un coup, elle part vers les Fontannelles. J’avais beau l’appeler, elle n’écoutait rien. Alors, je cours à ses trousses pour la faire retourner. Elle allait prendre le chemin des Pignèdes, et j’ai pu l’en empêcher. Alors, elle va dans le champ de luzerne des Fontannelles qu’elle traverse sans y goûter, monte au gros sorbier (qui était près du château d’eau actuel).

Je cours vite pour aller l’arrêter en traversant le jardin du facteur (partie Nord du champ des Fontannelles). En arrivant là haut : point de chèvre. Elle s’était retournée, avait pris le ravin qui sépare nos deux fontannelles, en ne laissant plus de trace de chèvre. Ce n’est qu’au bout d’un bon moment que j’entendis la clochette. Je me mis à trotter de ce côté-là, je la rejoins. J’essaye en vain de la faire descendre. Peines inutiles. Elle se couchait à tout moment. Lorsque j’eus assez trotté, je la laissais là, et m’en allais dîner, car je n’avais pas trop déjeuné.

Pendant ce temps, Maman est arrivée de Millau. Elle n’a pas voulu attendre davantage sans savoir ce qu’était devenue sa Paquette, et elle est partie aux Fontannelles. Mais elle a eu beau l’appeler « Paquette, Paquette », elle est revenue sans chèvre, comme elle était partie. Alors, lorsque nous avons eu dîné, tous les deux nous sommes repartis avec un sac à la recherche de Paquette. Nous l’avons trouvée à l’endroit où je l’avais laissée. Elle était en train de lécher ses deux petites filles. Nous l’avons laissé faire un bon moment, puis nous avons mis les deux chevreaux dans le sac et nous voilà sur le chemin du retour.

Maman emportant les nourrissons et moi je menais la nourrice attachée à la courroie. Et nous voilà arrivés au Monna, tous les cinq bien contents. A la prochaine fois, quelle nouvelle aventure !

Marc Parguel

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