Judo-Karaté

Millau : Patrick Fezay, le professeur du SOM Judo, se livre à cœur ouvert

Millavois.com : Le SOM Judo / karaté va bientôt fêter ses 70 ans. Pouvez-vous nous présenter le club ?

Patrick Fezay : Oui 70 ans, il fait partie du patrimoine local ! Je pense que chaque Millavois a un membre de sa famille qui a fait du judo… Le SOM a compté jusqu’à 360 licenciés dans les années 90, aujourd’hui, nous sommes plutôt autour de 200. Il compte un salarié, moi-même, et 6 à 8 bénévoles.

Les principales disciplines enseignées ici sont bien sûr le judo, le Ju-jitsu et le TaiSo (gymnastique féminine). En 1991 s’est greffé le Karaté Jutsu. A partir des années 2000, nous avons eu comme politique de développer des sections dans des communes autour de Millau : Rivière-sur-Tarn, Creissels, Nant, Saint-Jean-du-Bruel, La Cavalerie. J’ai lancé en premier la section de La Cavalerie, puis je l’ai transmise à un intervenant bénévole, une ceinture noire motivée. J’ai pensé que cela faisait partie de la transmission.

Le club est bien inséré dans le tissu associatif local, il entretient de bons rapports avec la mairie, le Conseil départemental ou encore avec la Fédération départementale et même, depuis 2009, avec des écoles au Japon.

Les cours s’adressent à tout le monde, à partir de 6 ans. Il n’y a pas de limite d’âge. Pour les plus âgés, nous avons des cours de judo au sol, ce qui limite les chutes. Nous sommes aussi ouverts aux personnes en situation de handicap, nous travaillons régulièrement avec l’IME du Puits-de-Calès et de façon plus ponctuelle avec la CAT des Charmettes.

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Le club, qui mélange convivialité, pratique et tradition, attache une vraie importance à un outil propre au judo, à savoir celui du code moral. Par les mots, par les actions, par le respect. On essaie d’expliquer cela aussi aux parents. Un enfant qui est champion, ça ne suffit pas pour être un judoka. Il doit aussi être responsable, dans son comportement, dans son attitude, c’est l’essence de l’enseignement du judo.

L’été a semble-t-il été mouvementé. Que s’est-il passé ?

Cette année, je suis parti 5 jours par mois en formation, et j’ai participé à un voyage au Japon pendant les vacances scolaires. Le 2 juillet, j’ai été convoqué à une réunion où on m’a signifié que mon salaire était trop important, et que les bénévoles en avaient marre de me remplacer. Les dirigeants ont pris la direction du club en octobre, moi je suis là depuis 27 ans, et en filigrane on me présente que c’est moi qui coule le club. Par contre, on ne m’a fait aucune proposition ! On me demande de revoir mon salaire à la baisse, mais sans alternative…

J’ai eu droit à une deuxième réunion avec les éducateurs, deux jours après. Une réunion qui a commencé avec des annonces de démission. Autant vous dire que j’ai pris une enclume sur la tête.

Le 9 août, à l’occasion d’une assemblée générale, l’ensemble du bureau et des éducateurs a démissionné. Et silence total à mon égard, on m’a laissé seul pendant deux mois. C’est grâce aux arts martiaux que j’ai réussi à rester calme [ il sourit ], malgré la panique à bord. Cette situation financière était déjà annoncée il y a 2 ou 3 ans !
Il y a eu des tractations, de nombreux compétiteurs sont partis dans d’autres clubs. Des jeunes sont partis, et je n’ai pas eu un coup de fil de parents. Ça a été la banqueroute totale.

Aujourd’hui, officiellement, je suis seul. C’est une expérience unique et disproportionnée, pas méritée, irresponsable. Dès le départ on a opposé les bénévoles et le salarié.

Le rapport moral de l’ex-présidente Laurie Nazon n’a pas été approuvé. Pourquoi ?

Moi je ne vote pas, je n’ai pas de commentaire. Elle a rendu compte de la saison 2017/2018. Peut-être les gens présents n’étaient pas d’accord avec la gestion de la crise.

Où en est le club aujourd’hui ?

Je vais le découvrir à partir d’aujourd’hui (NDLR, mardi soir). C’est la reprise, je vais évaluer la tendance. Les compétiteurs sont partis, et on arrête pour le moment les différentes sections des communes autour de Millau. Les futurs dirigeants vont décider de l’avenir du club. On aura moins d’adhérents, c’est sûr. On fera en sorte d’assurer les cours pour les plus jeunes et on fera en fonction.

De nouveaux partenaires ont déjà levé la main, mais la situation nécessitera peut-être une attention particulière de la mairie. Personnellement, je suis prêt à entendre les réflexions, en temps que salarié. Mais je crois que le judo a encore sa place dans le paysage millavois. Bernard Saules (vice-président du Conseil Départemental et président de la commission de la Culture, de la vie sportive et associative, NDLR), a été attentif lors de notre assemblée générale. Il a rappelé qu’« on maintient les clubs quand ça marche et il nous faut les aider quand ça ne marche pas »…

Des volontaires se sont proposés pour reprendre le club, ça va repartir ! De mon côté, je vais sans doute me retrouver au chômage partiel, ils vont me proposer des alternatives. Nous avons une réunion à la mairie le 21 septembre, je pense que mon cas sera abordé…

Que peut-on attendre cette année au niveau sportif ?

On va faire pas après pas, insister sur la formation des jeunes. Pour sortir un judoka en première division, il faut 10 ans. On fera avec les gens qui sont là, les gens qui nous font confiance, sans envier le voisin, on laissera les choses se faire naturellement.

27 ans au club… N’avez-vous pas envie parfois de tenter de nouvelles aventures ?

Si bien sûr, chaque fois qu’il y a eu des situations compliquées. Je m’étais formé pour accéder à des échelons supérieurs… Mais quand on commence à semer des graines en Aveyron, on s’y plait. J’ai aussi la chance d’être entouré d’amis. Après, on ne sait pas comment sera faite la vie… Mais je pense que moi aussi je fais un peu partie du patrimoine de ce club.

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