Dans cette tribune, Michel Durand, 1er adjoint à la maire de Millau, pointe du doigt les choix financiers jugés « hasardeux » de l’ancienne municipalité, en particulier le financement de l’EHPAD « Les Terrasses des Causses ».
À un an des échéances, Christophe Saint-Pierre et les membres de son association Millau en action, réduits, depuis leur démission ratée, au rang de spectateurs de la vie municipale, semblent soudainement frappés d’un activisme effréné et s’être lancés dans une campagne électorale quelque peu précoce.
Depuis quelques semaines, pas un projet, pas un dossier municipal, pas même un bilan financier même satisfaisant ne trouve grâce à leurs yeux. Un comble pour ceux qui avaient laissé une situation financière exsangue à leur départ malgré une augmentation des impôts de 12 %.
Résultat : agitation fébrile et articles dans les médias locaux. Il faut faire feu de tout bois.
Dernier épisode en date : dans un communiqué, l’ancien maire remet lui-même sur le tapis la réalisation et le mode de financement de l’EHPAD « Les Terrasses des Causses » en se posant en victime d’injustes critiques politiciennes venues de la majorité municipale.
D’emblée, que les choses soient claires : personne n’a jamais contesté la nécessité de construire un nouvel EHPAD digne de ce nom à Millau. Nos aînés méritaient un établissement moderne, sûr et adapté. Là-dessus, aucun débat. C’était un besoin partagé et un projet soutenu par toutes les municipalités, quelle que soit leur couleur politique et Monsieur Saint-Pierre ne manque d’ailleurs pas de rappeler l’engagement de la municipalité de Guy Durand sur le dossier.
Mais réagir à une nécessité ne signifie pas agir sans prudence. Un projet aussi structurant ne se juge pas à l’intention, mais à la rigueur de sa mise en œuvre.
N’en déplaise à Monsieur Saint-Pierre, là où effectivement le bât blesse c’est sur le mode de financement retenu et notamment le choix de deux emprunts à taux variable adossés au livret A sur 35 ans, non renégociables, où, qui plus est, l’intégralité du risque en cas de défaillance de l’établissement est portée par la seule ville de Millau.
Contrairement à un taux fixe garantissant une maîtrise des coûts, un taux variable est… variable, à la hausse comme à la baisse. Si ce taux pouvait sembler intéressant à l’instant T, quelle visibilité pouvait-on avoir de cette variabilité à l’horizon de 35 années sans aucune assurance contre les fluctuations des taux d’intérêt ? Ne dit-on pas que gouverner c’est prévoir ?
Et pourquoi ne pas avoir envisagé de partager les risques par un co-cautionnement avec le Département comme cela se pratique couramment partout en France pour ce type de projet ?
Le choix périlleux de cette forme d’emprunt spéculatif et d’isolement financier dont le risque repose sur une seule entité -la collectivité millavoise- n’est pas une fatalité ou un détail technique : c’est une décision politique, hasardeuse, à courte vue et aujourd’hui extrêmement coûteuse. À tel point qu’en 2024, la seule hausse des taux d’intérêt a déjà entrainé un surcoût de plus de 300 000 € auquel s’ajoute un facteur structurel avec une situation financière déficitaire de l’ensemble des EHPAD de France malgré une activité en progression.
Résultat : une vraie bombe à retardement budgétaire et un plan de financement initial irréaliste, surestimant les moyens financiers de l’établissement. Tous les acteurs, y compris le bureau d’étude missionné par la Banque des territoires et mandaté par la ville, le Département et l’ARS, chargé d’analyser la situation, s’accordent à considérer ce plan comme peu fiable, car il ne permettait pas d’assurer un équilibre économique solide notamment du fait du faible taux de subventions.
Pire encore : ce plan, validé par Christophe Saint-Pierre, prévoyait une hausse du prix de journée pour les résidents… avant même leur déménagement dans les nouveaux locaux alors qu’ils étaient encore hébergés dans des conditions indignes à Saint-Come ou à l’Ayrolle. Une décision qu’Emmanuelle Gazel et le Conseil d’administration ont refusé d’appliquer par décence afin de ne pas alourdir encore la charge financière de résidents qui n’étaient même pas certains à date de pouvoir bénéficier du nouvel équipement.
Pas de « chiffon rouge » comme vaudrait le faire croire Millau en action, la réalité tout simplement. Et alors qu’aujourd’hui cette réalité rattrape le projet, Monsieur Saint-Pierre tente de se défausser sur ceux qui n’ont fait qu’hériter de la situation en jouant la carte de la victimisation pour masquer ses responsabilités. Transformer, à coups d’effets de manche pré-électoraux, une prise de décision risquée en acte héroïque tout en désignant des boucs émissaires… Tartuffe n’aurait pas fait mieux.
Alors non, ce ne sont pas les « décisions structurantes » que nous déplorons, mais la légèreté et le manque de rigueur dans leur mise en œuvre. À titre de comparaison, en 2021, la Communauté de Communes a financé le complexe sportif à hauteur de 9 M€, via des emprunts à taux fixe à 0,95 % sur 25 ans. Un choix de bon sens, de « bon père de famille », qui garantit une parfaite maîtrise des coûts sur le long terme.
Comme sur beaucoup d’autres dossiers, sous couvert d’ambition, il est assez facile d’avoir des idées, d’exceller dans l’art d’échafauder de grands projets. Plus difficile de savoir les financer de manière responsable et en fonction de ses moyens et surtout, de les mener à bien en prenant soin d’éviter que la facture ne risque tôt ou tard d’être acquittée par les contribuables.
Ce projet, conçu sans filet de sécurité, en est un symbole parmi tant d’autres.
Du côté de la majorité municipale, nous continuons et continuerons à travailler avec sérieux dans l’intérêt des Millavoises et des Millavois, loin des polémiques stériles et de l’agitation entretenue par une opposition démissionnaire à plus d’un titre.
Michel DURAND,
1er Adjoint à la Maire de Millau