Sous la plume acérée de Karine Haumaitre, élue d’opposition à Millau, se dévoile une chronique sans concession autour du projet culturel « Le Silex ».
Comment ne pas avoir la nausée lorsque l’on observe les dessous de la gouvernance de notre commune ? Cet épisode est un révélateur. Ne le minimisons pas.
Fin 2020 : Le projet Silex aurait dû être un motif de fierté collective. Pensé comme un lieu culturel innovant, hybride, ouvert aux pratiques artistiques multiples et aux initiatives citoyennes, il portait une ambition claire : doter Millau d’un équipement structurant, au service de la création et du lien social. Un projet né sous la précédente mandature, élaboré avec les acteurs culturels,
Mais à peine élue en 2020, la nouvelle majorité municipale décide de le saborder.
Il est enterré, rejeté, balayé. Bien « qu’intéressant et innovant », il est sacrifié officiellement sur l’autel des contraintes budgétaires. Il est jugé « trop ambitieux, peu cohérent, trop coûteux, mal calibré ». Mais il est surtout dit « non prioritaire » et donc sacrifié sur l’autel du « principe de réalité implacable d’urgence de sécurisation des archives ». Ce dernier fera alors se positionner nos élus vers « un choix responsable d’un lieu tout trouvé et très vite tranché : les sous-sols du CRÉA » en lieu et place du silex.
Début 2021- juin 2023 : Face à la stupeur, l’incompréhension, la déception des élus, des acteurs culturels, de la population on déclare en conseil municipal, en communiqué que « tous les avis contraires ne sont qu’un brouhaha, un vacarme d’une minorité ». Et que « si on faisait un sondage dans la rue pour interroger sur ce qu’est le Silex, peu saurait répondre et s’y intéresserait ». On met en avant l’idée d’un « redéploiement » (vers la médiathèque pour MicroFolie, MDE pour FabLab et suppression des studios d’enregistrement). Redéploiement défendu comme étant bien plus pertinent que l’idée de départ, car il est bien connu selon eux que « quand une ruche est trop bourdonneuse, elle ne produit plus de miel ». Puis on déclare que « ce n’est plus un sujet ».
Fermez le ban. Les engagements pris envers les partenaires sont rompus. Et toute tentative de relance est systématiquement balayée.
Fin 2023 : revirement spectaculaire. Changement de ton. Ce projet dont on ne voulait plus parler, redevient soudain essentiel. Le projet va pouvoir voir le jour… grâce à « de nouvelles ressources financières qui ont été dégagées ainsi qu’à un travail transpartisan fondé sur le respect de l’intérêt général ». Déclaration indécente et mensongère. Ce retour du Silex n’est pas le fruit d’une réflexion culturelle dans un intérêt général, ni d’un redressement budgétaire, ni d’un sauvetage réalisé des archives. Ce projet n’a pas été réhabilité par vision, par cohérence ou par un soudain sursaut. Il a été négocié par nécessité arythmique. Il est le résultat d’un marchandage conclu dans la coulisse entre la majorité et une élue d’opposition pour des raisons de survie politique d’une majorité vacillante. Ce revirement est opportuniste et d’un cynisme sans vergogne. Dire le contraire est travestir la réalité. Ne pas le dénoncer serait un manque de respect envers la population pour qui la probité de nos élus doit être la seule boussole.
2025 : Inauguration du Silex… À l’heure où les projecteurs se braquent sur la récente inauguration, on ne peut s’empêcher de noter l’aplomb, l’impudence des déclarations faites par ceux-là mêmes qui ont sabordé le projet et se permettent de réécrire l’histoire en mettant des coups de peinture sur des reniements passés. Cette inauguration est l’art de transformer une trahison passée en un succès collectif. À l’heure où on salue l’audace, l’innovation et la vision, ayons de la mémoire sur les écueils les luttes et les voix étouffées qui ont pavé cette route.
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Bravo à Madame Fort d’avoir négocié et imposé ce deal. D’avoir persévéré. La manière, la forme est révoltante, mais le fond doit rester essentiel. Grâce à cela, même s’il reste des zones floues sur son fonctionnement, le Silex espace Karine Orcel est là. Il représente une vraie chance pour Millau. Pour ses artistes, ses jeunes, ses associations. Pour la ville dans son ensemble. Mais cela ne doit pas empêcher à l’heure où l’on parle des futures échéances municipales de garder en tête l’instrumentalisation de ce projet culturel et de rester vigilant. Millau mérite une politique portée par des convictions sincères, pas par des calculs d’arrière-cuisine pas très propre où les deals semblent être légion.
Karine Haumaitre, élue d’opposition
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