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Millau. Jean-Vigo : « On assiste au démontage de notre lycée professionnel »

Ce mardi 6 juin, des syndicats appelaient les personnels éducatifs à se mettre en grève pour protester contre la réforme du lycée professionnel. Au lycée professionnel Jean Vigo de Millau, une quinzaine d’enseignants font aujourd’hui le piquet de grève devant les grilles de l’établissement.

Déjà sous tension depuis l’annonce de la fermeture du CAP Conducteurs d’Engins de Travaux Publics (qui sera finalement maintenu au moins une année, NDLR), les enseignants du LP Jean Vigo attendaient les mesures d’Emmanuel Macron pour l’enseignement professionnel, le 4 mai dernier, suivies des annonces du ministre de l’Éducation nationale concernant des fermetures de filières pour savoir à quelle sauce ils allaient être mangés.

Fermeture de filières, pacte enseignant, reconversion de professeur de lycée professionnel (PLP) en professeurs des écoles… Une série de mesures qui selon les grévistes « vont appauvrir encore plus l’enseignement » et qui viennent s’ajouter à « des bas salaires et des conditions de travail sans cesse plus difficiles ». « Au final, ce sont les élèves qui trinquent », assurent-ils en chœur.

« Des filières qui vont disparaitre »

« Avec la réforme, ce sont les entreprises implantées dans la région qui vont dicter leurs exigences aux lycées pro. Un élève qui serait motivé par une filière qui l’intéresse risque de ne plus trouver de lycée qui la propose dans son académie », alertent les PLP.

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Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l’Enseignement et la Formation professionnels, a en effet annoncé qu’à partir de la rentrée 2023, si 1.000 formations « vers des métiers d’avenir » vont ouvrir (énergies, environnement, numérique…), d’autres vont fermer, notamment en gestion et en commerce. Des formations justement proposées par le LP Jean Vigo, et plus généralement par les LP ruraux du sud Aveyron…

Ajoutez à cela des élèves qui passeront plus de temps de formation en entreprises privées (12 semaines au lieu de 8), et ce sont des craintes légitimes sur les prochaines DGH (Dotation Globale Horaire) qui refont surface. En clair, moins d’heures d’enseignement qui pourraient conduire à des suppressions de poste.

Et la déclaration de Pap Ndiaye qui encourage les professeurs des filières concernées à se reconvertir n’a fait que mettre de l’huile sur le feu. Le ministre de l’Éducation nationale leur propose en effet de se tourner vers les métiers de professeurs en collège, professeurs des écoles, ou encore de travailler dans des « bureaux des entreprises », au sein des lycées, qui permettront aux élèves de trouver des stages. « On assiste au démontage de notre lycée professionnel », se désolent les professeurs du LP Jean Vigo.

« Des formations au rabais »

Les mesures qui accompagnent la réforme sont aussi dénoncées, et en particulier le « pacte » présenté comme une revalorisation (pouvant aller jusqu’à 7500 euros brut par an) en échange de missions supplémentaires (estimées à 10 à 15 heures supplémentaires par semaine). « C’est une tromperie. Travailler plus pour gagner plus n’est pas une revalorisation », pestent les professeurs, qui soulignent qu’on leur demandera plus de missions obligatoires pour bénéficier de cette revalorisation qu’à leurs collègues de lycée général. « Et il s’agit uniquement d’une prime accordée à des volontaires, pas d’une revalorisation des salaires. C’est diviser pour mieux régner face à des personnels qui se demandent s’il faut accepter un pacte, mais à qui on ne demande même pas de revaloriser leur contrat existant ». « Ils veulent nous faire passer en primes ce que l’on faisait déjà en heures supplémentaires », note aussi un professeur.

Et au-delà de cette réforme, qui prévoit une formation obligatoire sur la « conduite du changement » et sur « les évolutions des cartes de formation » donc « sur les fermetures de filières », et qui est présentée sous la forme d’un pacte pour les professeurs volontaires avec une revalorisation salariale à la clé, les professeurs du LP Jean Vigo s’inquiètent pour l’avenir de leurs filières et celui de leurs élèves. « Avec cette réforme, on va leur proposer des formations au rabais, avec moins d’heures de cours, avec une carotte de 50 € par semaine. Les élèves voient que leur période de formation sera rémunérée, mais ils ne se rendent pas compte que pour des périodes plus longues qu’auparavant, cela fait à peine une vingtaine d’euros par semaine, et payée par vos impôts. Une main-d’œuvre vraiment pas chère pour les entreprises ! ».

« Jusqu’alors on formait à un métier, demain on formera à des tâches », constatent les PLP, qui attendent lundi 12 juin et une rencontre avec la proviseure Sylvie Pierot pour en savoir plus quant au sort qui leur est réservé pour la prochaine rentrée.

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