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La grotte-fromagère de Clapade (commune de Millau, Causse du Larzac)

Située dans la commune de Millau, entre la ferme et la chapelle ruinée de Saint-Martin de Clapade, placée sur une butte au lieu-dit Serre de Lerme (ermitage) (chapelle appelée aussi de Mauriac), dominant la Dourbie, la grotte fromagère de Clapade se présente comme une minuscule cave, sans doute l’une des plus petites connues à ce jour. Les propriétaires qui l’ont utilisé au XIXe siècle se sont simplement contentés de murer son entrée, aucune ventilation n’y est apparente.

Une fois la porte passée, nous entrons dans une salle semi-circulaire de 6 mètres de large sur 4,20 m de profondeur. Une banquette naturelle de 40 cm de hauteur occupe toute la partie gauche faisant office d’étagère. Un crochet apparaît suspendu en son centre. Cette grotte bien exposée n’a nécessité que peu de travaux d’aménagement, en dehors de son mur de fermeture, l’entrée se trouvant sous une barre dolomitique en bordure du Causse. C’était une cave privée n’affinant, ou ne conservant que des fromages fabriqués par le propriétaire de la ferme et destinés à son usage personnel.

Photo © Karine Orcel

Maurice Labbé et J.P. Serres ont retrouvé des vestiges de son exploitation : « Des fragments de faisselles ont pu être recueillis, dont un portant la marque de Laurens dit Paulet, Potier de Millau, Laurens était un potier qui a officié dans les dernières décennies du XIXe siècle. Son papier à lettres portait les mentions : poterie et briqueterie, faïence, porcelaine, verre, cristaux et poterie en tout genre. » (L’épopée des Caves Bâtardes, 1999)

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Avant que cet usage d’utiliser ces caves bâtardes ne soit interdit, A. Boyer en 1909 se faisait le défenseur de ces petits propriétaires qui affinait des fromages sur leurs terres : « Aujourd’hui, divers propriétaires exploitent encore une quinzaine de ces caves, et, il faut même bien le dire, leurs produits sont souvent meilleurs que ceux fabriqués à Roquefort parce que, dans ces cas, on se sert  exclusivement pour l’affinage des procédés naturels. Ces caves ont aussi un énorme avantage pour la très petite propriété, elles servent de débouchés aux petits fermiers, perdus en pleines montagnes, à qui leur éloignement de toute fromagerie et le peu d’importance de leur production laitière font une nécessité de la fabrication domestique. Si donc on comprend que les négociants de Roquefort aient eu un intérêt commercial a combattre et à faire disparaître ces caves, on ne peut d’un autre côté, au point de vue agricole, que souhaiter leur maintien, nécessaire à la satisfaction des intérêts des agriculteurs qui ont le plus besoin d’être soutenus puisqu’ils sont les plus déshérités et les plus pauvres » (L’industrie fromagère à Roquefort, Paris 1909).

Même s’il s’agissait d’une cave de ferme, selon la qualité de l’air et l’emplacement de ces grottes, certains propriétaires en profitèrent pour faire commerce de fromages sous l’appellation « Roquefort », mais ceci ne dura qu’un temps comme nous le rappelle Paul Marres : « Quelques fromageries locales, utilisant des grottes favorables, doivent se fermer ou se laisser absorber, par Roquefort. Depuis la loi de 1925 interdisant de qualifier fromage de Roquefort tout fromage affiné dans des caves autres que celle du Combalou à Roquefort, les caves locales se sont fermées ».(Les grands Causses, 1935).

Photo © Karine Orcel

En sortant de cette grotte-cave, il convient de contempler le paysage splendide qui s’offre à nous au-dessus de la Dourbie et de Font-Longue vers le Monna et Millau.

Marc Parguel

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