Education

Millau. La colère augmente dans les rangs des professeurs

Après les professeurs du lycée Jean Vigo qui ont boycotté le dernier conseil d’administration pour protester contre la nouvelle Dotation Horaire Globale, ce sont ceux du collège Marcel Aymard qui ont rejoint le mouvement de contestation.

Ce vendredi 11 février, les enseignants s’étaient donné rendez-vous à 11h devant les grilles du collège Marcel Aymard pour débrayer symboliquement pendant une heure dans le but de dénoncer une nouvelle baisse des moyens. Elle impactera l’établissement dès la prochaine rentrée à hauteur de 35h50 en moins d’enseignement, et se traduira par la fermeture d’une classe de sixième et l’augmentation du nombre d’élèves par classe.

Dans trois disciplines, Français, histoire-géographie et espagnol, cette diminution du temps d’enseignement contraindra trois professeurs (les derniers arrivés) à assurer des compléments de service dans d’autres établissements pour effectuer leurs heures en totalité. Des conditions que certains ne peuvent pas accepter compte tenu de leur vie personnelle et qui les contraignent à passer à mi-temps malgré la perte financière engendrée.

Une baisse constante des moyens

La pilule ne passe pas pour le corps enseignant qui se dit « déjà fortement impacté par la crise sanitaire et dénonce une baisse constante des moyens depuis plusieurs années et le mépris de son gouvernement ». La mobilisation était forte ce vendredi matin « pour défendre le service public et continuer d’assurer un enseignement de qualité auquel tous croient encore malgré des classes déjà surchargées, comme en 5e ou la moyenne est de 30 élèves par classe ».

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À la rentrée dernière déjà trois élèves n’ont pas pu être scolarisés en raison d’un nombre trop important d’inscrits et sont partis dans les écoles privées faute de pouvoir rester dans le public, le collège le plus près étant celui de Saint-Affrique, trop éloigné pour les familles.

À l’heure actuelle, le collège ne bénéficie que de deux CPE contre trois nécessaires pour un collège de cette taille (1000 élèves). L’un d’eux est actuellement malade et n’est toujours pas remplacé. Autant « de moyens supprimés qui auront et ont déjà des effets désastreux sur les élèves et la profession ».

Une nouvelle stratégie pour le sud-Aveyron ?

Dans un communiqué, les représentants des professeurs expriment leur colère, mais surtout leur inquiétude pour le territoire.

« Il semblerait que de nouvelles stratégies se mettent actuellement en place : mutualiser les moyens sur le bassin du Sud-Aveyron afin de faire des économies, modifier la carte scolaire et ainsi rentabiliser le nouveau collège du Larzac (dont l’ouverture est justement prévue en septembre 2023). Tout cela au mépris des difficultés d’organisation des familles et des contraintes kilométriques.

Plus largement, certains professeurs présents se demandent si ce n’est pas une volonté « d’épurer les rangs de l’éducation nationale de ses fonctionnaires pour faire appel à des professeurs contractuels moins bien payés et moins bien formés ».

Un enseignement de qualité

Dans un trac également distribué aux automobilistes et aux passants ils font part de leur revendication et expliquent qu’ils se battrons pour : le maintien de la classe de sixième, la création d’un classe de 4e, davantage de moyens pour réduire les effectifs, créer des groupes de langues, avoir un poste de CPE et plus d’AED pour le suivi et l’encadrement des élèves.

Des soutiens importants

Grâce à ses actions, les enseignants espèrent alerter les parents d’élèves sur « ces problèmes récurrents qui s’aggravent et auront de véritables répercussions sur leur vie quotidienne, ils espèrent qu’avec leur soutien, ils pourront obtenir des moyens supplémentaires ».

La municipalité, comme elle l’a fait pour le lycée Jean Vigo exprime à nouveau son soutien et affirme qu’elle fera tout ce qui est en son pouvoir pour obtenir des moyens supplémentaires de la part de l’éducation nationale. Aurélie Eson adjointe à l’éducation et à la restauration collective et Séverine Peyretout conseillère municipale déléguée à l’insertion des jeunes et à la vie étudiante, ont rédigé une tribune qui résonne aussi comme « un cri d’alarme, d’enseignantes et de mamans d’élèves ».

« Établissements scolaires secondaires en détresse ! »

« Ces quelques lignes sont le cri d’alarme d’élues à la mairie de Millau pour l’enseignement supérieur et l’éducation, d’enseignantes et de mamans d’élèves.

Siégeant en tant qu’élues aux Conseils d’Administration du collège Marcel Aymard et du lycée Jean Vigo, nous faisons un constat grave et alarmant : depuis son arrivée au ministère de l’Éducation nationale, Monsieur Blanquer, contribue à dégrader à l’extrême notre système scolaire.

À l’ordre du jour de ces conseils d’administration : le vote de la répartition de la DGH, veuillez comprendre la Dotation Globale Horaire, c’est-à-dire l’enveloppe d’heures donnée(s) à un établissement pour préparer sa rentrée. Cette répartition doit se faire en prenant compte d’une part la prévision des effectifs et d’autre part les postes d’enseignants dont il « dispose » : le chef d’établissement n’a souvent d’autre choix que d’envoyer ailleurs les enseignants qui « indisposent » le système, car il n’a à « disposition » que trop peu d’heures…

Notre ville accuse depuis quelques années comme à l’échelle départementale, régionale et nationale une légère baisse démographique, mais celle-ci est le prétexte pour l’Éducation nationale à procéder à la fermeture de classes dans le secondaire. Ainsi, les futurs élèves de 6e

– Aujourd’hui élèves de CM2 – choyés dans les écoles de notre ville, petites écoles où les effectifs oscillent entre 20 et 25 élèves par classe en moyenne se retrouveront à la rentrée dans des classes à 28/29 élèves. Ce chiffre atteignant même les 29/30 en 4e, empêchant par là même l’établissement d’accueillir en cours d’année des élèves : ceci est fréquent dans notre ville ! Quant au lycée Jean Vigo, la perte d’une classe de 2de à la rentrée 2022, faisant suite à la perte d’une classe de 1re à la rentrée 2021, voit ses effectifs atteindre les 35/36 élèves par classe !

Il est utile de rappeler qu’avec de tels effectifs, le chef d’établissement devra se demander dans quelle classe il pourra bien accueillir les nouveaux arrivants, sans que celles-ci ne débordent ou se résoudre à refuser des inscriptions comme cela a été le cas à Marcel Aymard pour 3 élèves cette année, orientés vers Saint-Affrique. Ces mêmes classes dans lesquelles se trouvent aussi de plus en plus d’élèves avec des troubles des apprentissages, des élèves marqués psychologiquement et scolairement par la crise du COVID qui dure depuis deux ans ! Monsieur Blanquer, lui, s’obstine à baisser les moyens alloués à nos établissements scolaires, à accroître encore la charge de travail des enseignants et surtout les inégalités entre élèves. C’est un scandale !

Dans la présentation de la DGH du collège Marcel Aymard, le constat a été fait qu’un certain nombre d’éléments étaient encore financés en 2018, à savoir le latin, l’occitan, le bilinguisme (anglais, allemand, espagnol), le chinois, aujourd’hui, ceux-ci ne le sont plus et doivent être pris sur un volant d’heures d’autonomie, lequel sert également au dédoublement, à l’accompagnement personnalisé, etc. Par ailleurs les heures APM, Allocation Progressive des Moyens, c’est-à-dire des heures supplémentaires allouées proportionnellement aux difficultés économiques, sociales et scolaires des élèves, ne sont plus accordées elles aussi, ce n’est certainement pas parce que ces difficultés sociales, économiques et scolaires auraient disparu, non ! Elles persistent, mais faute de moyen…

Monsieur Blanquer gère nos établissements secondaires ruraux comme il gère ceux des grandes villes, car là est la réponse des représentants de l’Éducation nationale, pourquoi vous plaindre d’avoir 30 élèves par classe ? C’est aussi le cas dans les grandes métropoles ! Mais nous sommes ici à Millau, dans un milieu rural, les élèves ne traversent pas la rue pour trouver un autre établissement dans lequel ils pourraient faire la langue ou l’enseignement de spécialité (lycée – nouveau bac) qu’ils veulent faire pour construire leur avenir ! Rappelons que l’enseignement de spécialité espagnol a disparu à la rentrée 2021 au lycée Jean Vigo, forçant un certain nombre d’élèves à l’abandonner ou à le continuer à Rodez ! À la rentrée 2022 c’est l’option musique qui est menacée !

Victor Hugo a dit : « Les maîtres d’école sont des jardiniers en intelligences humaines ».

Nous ne devons pas ignorer ce qui se passe dans notre collège et lycée, nous ne pouvons pas tolérer la dégradation du système scolaire à laquelle nous assistons depuis que M.Macron est au pouvoir ! Nous devons être tous solidaires et faire entendre la voix de la ruralité pour une égalité des chances pour tous nos enfants ! »

Aurélie ESON & Séverine PEYRETOUT

 

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