Actualité

Patrimoine Millavois : A propos du buste d’André Balitrand

Prenons cette semaine la rue André Balitrand (1864-1931) située entre l’avenue Charles de Gaulle et la rue Albert Carrière. Avant de porter ce nom, la « voix publique » avait donné à cette rue mesurant 460 mètres de long pour 7 à 9 m de large le nom du quartier attenant, en la baptisant : «  la rue du chapeau blanc » (1910) . Puis, ce nom de « Chapeau Blanc » disparaissant petit à petit des mémoires, on avait tendance à appeler cette voie « la rue du Cayrel » jusqu’au début des années 1930.

A peine le décès d’André Balitrand prononcé le 20 décembre 1931, victime d’une opération urgente, dans une clinique de Toulouse, on décida d’honorer la mémoire de cette personnalité de premier plan, au cours d’une délibération prise à Millau le jour même de son décès : « Dans sa séance du 20 décembre 1931, le conseil municipal a décidé à l’unanimité des membres présents de donner à la nouvelle rue longeant le parc de la victoire, le nom d’André Balitrand. Jusqu’ici la population l’avait dénommée rue du Cayrel à cause du quartier où elle avait été ouverte » (L’Auvergnat de Paris, 9 janvier 1932).

La rue André Balitrand. (DR)

Rien de plus naturel que de donner le nom d’ André Balitrand  à cette rue toute proche du Parc de la Victoire, car c’est lui qui fit l’acquisition du terrain lorsqu’il était Maire de Millau. Né le 9 août 1864, rue droite, André Balitrand était le fils de Joachim Louis Balitrand, celui qui avait composé le chant si connu des Millavois, « Las Ounzadas ». Après de sérieuses études, il s’inscrit comme avocat au barreau de Millau. On le voit apparaître comme conseiller municipal « radical » dans la municipalité d’Etienne Delmas en 1892. Avec ses talents d’orateur, il sera constamment réélu jusqu’en 1928. En 1902, il devint député de Millau jusqu’en 1919 et de 1924 à 1928.

André Paul Lucien Balitrand © Assemblée Nationale

De 1905 à 1912, il devint Maire de la ville de Millau.

Publicité

Parmi ses grands travaux d’utilité publique, il fera l’acquisition du couvent des Capucins (au Barry en 1907), mais surtout l’acquisition du « Champ Bouquier » qui deviendra le Parc de la Victoire.

Après avoir érigé dans ce parc la statue à l’honneur de François Fabié, dû au ciseau de célèbre sculpteur millavois Verdier le 16 octobre 1930, ainsi que le grand bassin central, la municipalité décida d’élever un buste en marbre à la mémoire de ce « vrai porte-drapeau du parti républicain aveyronnais ».

Le grand bassin du Parc de la Victoire. (DR)

Une souscription populaire fut ouverte en hommage de celui qui fut tour à tour ancien député et maire de Millau, conseiller général. Comme nous le rappelle le journal « L’Auvergnat de Paris » dans son édition du 6 août 1932 : « Grâce à notre regretté compatriote, la ville de Millau possède un parc splendide qui fait la joie de la population et l’admiration des nombreux touristes. Les fonds sont reçus par M. le Dr Bompaire, 4 rue Louis Blanc, à Millau ». Toutes les communes voisines mirent la main à la poche selon leurs moyens. Au conseil municipal de Peyreleau, fut votée en août 1932, une subvention de 200 francs « en faveur du monument à élever à la mémoire du regretté André Balitrand, ancien député » (L’Auvergnat de Paris, 27 août 1932).

La délibération du conseil municipal du 9 septembre 1932 alloue la somme de 10 000 francs au comité du monument André Balitrand pour sa réalisation, considérant André Balitrand comme « le créateur et l’animateur du Parc de la Victoire ». Ce sera le sculpteur millavois Joseph Malet (1873-1946) élève du sculpteur Falguière, qui réalisera l’œuvre.

Portrait d’André Balitrand. (DR)

En janvier 1933, la souscription ouverte s’élève à la somme de 29 000 francs et dès l’été de cette année là, on érigea le monument dans le Parc comme nous le rappelle cet extrait de presse : « Le buste d’André Balitrand…œuvre du sculpteur Malet, est enfin édifié au « Parc de la Victoire », face à la rue portant le nom de notre bien regretté compatriote. Son inauguration aura lieu le dimanche 8 octobre, sous la présidence de M. Vigarié, conseiller général de Laissac, ami personnel de M. Balitrand (L’Auvergnat de Paris, 12 août 1933).

Le buste d’André Balitrand. (DR)

Et en effet, le 8 octobre 1933, l’inauguration eut lieu solennellement : « Le monument élevé à la mémoire de M. André Balitrand, ancien maire, conseiller général et député de Millau a été inauguré au Parc de la Victoire, au milieu d’un grand concours d’amis. M. Vigarié, ancien conseiller général, ami du défunt, présidait cette cérémonie, entouré de MM. le docteur F. Bompaire, président du Comité d’exécution ; Antony, préfet de l’Aveyron ; Montservin, sénateur, maire de Rodez ; Ramadier, député, maire de Decazeville ; Jammet sous-préfet de Millau ; le docteur Barsalou, conseiller général, maire de Millau ; Cannac, ancien sénateur, conseiller général, Albert Jonquet, délégué du comité du Monument ; Maurice Artières, ancien président de la Chambre de Commerce, ainsi que de nombreuses personnalités politiques. Le monument de marbre blanc, dû au ciseau du sculpteur Malet, s’élève sur une colonne de granit rouge de Bretagne au rond-point du Petit Nice.

La mémoire de l’ancien maire de Millau et de l’homme politique qui fut si longtemps le chef des partis dits « de gauche » du département fut honorée en plusieurs discours pleins d’éloquence. » (Journal de l’Aveyron, 22 octobre 1933).

Quatre haut-parleurs ont diffusé les discours et les exécutions musicales de l’Harmonie municipale et de l’orphéon « Les Montagnards ». Si le corps d’André Balitrand ne repose pas dans sa ville natale, mais à Castelnaudary, son souvenir est toujours intact, à l’image de ce poème écrit In mémoriam : « Si sa cendre repose en terre étrangère, son image est dressée à jamais en ce parc merveilleux, où les petits enfants viendront offrir des fleurs au bienfaiteur… ».

Le lotissement du Cayrel fut rebaptisé le 19 mai 1960, (délib. du conseil municipal) par la rue Albert Carrière.

A l’occasion des travaux de « requalification paysagère » du Parc de la Victoire, de 2014 à 2017, le buste en marbre érigé sur sa colonne de granite, fut nettoyé retrouvant sa blancheur d’antan.

Marc Parguel

Bouton retour en haut de la page