Causses et vallées

Bréfuel (commune de Millau, vallée de la Dourbie)

Bréfuel se situe rive gauche de la vallée de la Dourbie à trois kilomètres de Millau. Albert Jonquet, habitant de Massebiau écrivait à son sujet en 1951 : « Un peu plus loin se trouvait le petit château de Bréfuel avec une petite fermette dont le fermier vivait péniblement. Ce château appartenait à un nommé Guy, qu’on appelait « Guy le riche » et qui fut à un certain moment un des plus riches propriétaires terriens de notre ville. Ce château était huit à neuf mois par an à l’ombre et d’ailleurs le propriétaire le vendit, ne voulant plus y habiter avec sa famille ; il se retira à Amélie-les-Bains ».

A la mémoire de cet homme : Daniel Guy ; le poète Henri Terral (1852-1897) fit un poème qu’il intitula tout simplement « Brefuel » dont voici quelques vers :

Plus loin que le chalet du Grêle,
Merveilleux pendant de l’Hymen,
Quelle est cette villa si belle,
Quel est ce magnifique Eden
Qui se mire dans la Dourbie !…
C’était la Mort, et c’est la vie,
C’est Bréfuel, séjour enchanté,
Où, lorsque le temps est propice,
Nous allons pêcher l’écrevisse,
Pendant les longs jours de l’été.
Sur les bords de ce frais rivage,
Pauvre rêveur déshérité
Qu’attriste le manque d’ouvrage,
Je vais dénicher la gaité ;
Là, je vois la brune hirondelle
Rasant la rive de son aile,
Prendre au vol les papillons blancs,
Et tout près, à travers les arbres,
Un groupe de superbes marbres
Vient m’entretenir du vieux temps.
J’adore ces rives si belles,
J’aime ce palais de Bréfuel,
Car les rimes, ailleurs rebelles,
Ici volent à mon appel ;
Et joyeux de voir que Minerve
Dans ces lieux aiguise ma verve.
Poète, je n’ai qu’un souci,
C’est de rendre un sincère hommage
Au mortel qui sur ce rivage
Miscuit utile dulci….-

26 Septembre 1884 poème d’Henri Terral
extrait de « Loisirs d’un Prolétaire » tome Ier, 1888.

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25 mai 2014. DR

Bréfuel (Verfuelh en 1452) signifie un nom de bois. Il est certainement le lieu dont l’orthographe a subi autant de variations et de fantaisies. On le trouve écrit : Verfuelh, Verfeil, Brefeuil,Breffeuilh, Brufuels, Brefueld, Burfiels, Burfueld, Burfuel, le cadastre de 1830 le nomme Brufuel, la carte d’Etat-major Bréfuel. 

La métairie de Brefuel qui appartenait, au XIVe siècle, aux Fournier, marchands de Millau, vint au XVe siècle, dans la famille de Montcalm. En 1452, « M.Johan de Montcalm » était imposé de la somme de 75 livres pour « hun affayre et bosc apelat Verfuelh ». En 1528, « lo noble M. Gailhard de Montcalm, licenciat » est taxé 131 l. 5 s. pour « lo fach de Verfueilh, en loqual a sept jornals de prat, hostal et bosc ». Outre cette imposition, Brefuel supportait encore les charges suivantes : deux setiers anona (mélange de grains) aux charités Saint Marc ; 8 « cartos » huile de noix au monastère de Saint Léons ; 1 carte avoine à l’Hôpital d’Aubrac ; 12 deniers au Prieur de Millau ; enfin, une « cartal vy » au prieur voisin de Félis. 

La mare aux poissons rouges devant la métairie (25 mai 2014) DR

Dans le grand cadastre de 1668, Brefuelh est désigné ainsi qu’il suit : « Metterie consistant en maison, pigeonnier, jasse, cour, four, jardin, aire, champs, bois, rivage, dans laquelle pièce passe le chemin de Millau al valat de Roubelié ». De Géraud Gély, marchand, qui la possédait alors, cette propriété passa à sa petite nièce, Marguerite de Solages, épouse d’Antoine Marcorelles, aussi marchand (1720) Commes Guillaume était au début du XVIIIe siècle métayer de Brefueld (Le 27 mars 1714 est enseveli Commes Guillaume « fils du métayer de Brefuel) ». La famille Fabre Pierre (1725) puis Etienne (1773) lui succédait dans cette fonction. Les Artières remplaçaient les Fabre au XIXe siècle : Gabriel en 1819 ; Louis en 1833, Adrien en 1906. En 1858, Louis Artières habite Bréfuel, il déménagera pour Massebiau en 1875. En 1876, Pierre Jean Baldayrou est propriétaire. Puis il passa à la famille Guy.

6 juin 2021. DR

En 1888, un autre Artières (Adrien) vient habiter Bréfuel, il y restera jusqu’en 1906. Parmi les faits divers, citons celui d’octobre 1858 : « Dimanche dernier, un homme qui traversait la Dourbie en face de Bréfuel, fut renversé par le mulet sur lequel il était monté, en un point où la rivière avait une assez grande profondeur. Heureusement, le sieur Louis Carrière, domestique au Monna, passait en ce moment sur la route, et ne voyant pas reparaître sur l’eau le cavalier désarçonné, il n’hésita pas à se lancer dans la rivière. Ce secours ne pouvait venir plus à propos, car le malheureux cavalier avait eu la jambe cassée d’un coup de pied de son mulet, ce qui lui rendait impossible tout effort pour se relever et se maintenir contre un courant assez rapide ». (Echo de la Dourbie, 23 octobre 1858)

L’ancienne métairie de Bréfuel, dont le dernier propriétaire est venu d’un pays voisin a dû bien investir pour en faire aujourd’hui une aussi belle résidence.

Marc Parguel

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