[dropcap]V[/dropcap]essac se situe à 4 km au nord-est de Saint André de Vézines. Son nom viendrait de Vettius soldat, et son origine de par sa finalité en ac serait gallo-romaine. Paul Nogaret à ce sujet écrivait: « Etant donné la situation de Vessac au centre du Causse, on peut croire que ce fut là, le centre d’une grande propriété romaine, un fundus ».
D’après le dictionnaire Vayssier : « Pourrait être la déformation de Bessac (Bessada) ; cloison de bois, souvent en bouleau (Lo Beç, la Beçada : bouleau, bois de bouleaux) partageant en deux parties une bergerie. De ce fait, un autre sens pourrait s’envisager, maisons jumelles (Besson, Bessona : jumeau, jumelle) » (P. Solassol, Toponymie du Causse Noir, printemps 1986).
On retrouve dans de vieux actes l’écriture Béssac (1696), Vaissac (1741), Bessac (1758). Le village de Vessac est mentionné pour la première fois dans une charte du XIe siècle. En 1070, Hugues de Montméjean donne au Monastère d’Aniane des revenus sis sur les terres Vessac, in Vizaco (Cartulaire d’Aniane). De nombreux vestiges archéologiques nous démontrent que ce coin du Causse Noir était habité bien avant.
A 600 mètres au sud du village, le menhir de Vessac est pour la première fois mentionné dans les mémoires de la Société des Lettres sous la plume de M. Valadier dans une étude intitulée « Les monuments celtiques de l’Aveyron » en date du 4 juin 1863, il dit en parlant de ce menhir qu’il mesure « 2 mètres et demi à 3 mètres d’élévation, se trouve sur le plateau du Causse Noir, près Millau, entre Saint André de Vesines et le domaine de Sarraliès ». Louis Balsan ajoute : Monolithe de Calcaire ; hauteur au-dessus du sol 4 mètres ; penche vers le Nord-Ouest. » (Visite Balsan, 7 novembre 1924).
La tradition orale veut qu’au XIXe siècle, le propriétaire du champ dans lequel se dressait le menhir décidât de le faire tomber, car il en avait assez de voir cette pierre fichée en plein milieu de son champ. Afin de faire tomber la pierre, il prit une paire de bœufs qu’il accrocha avec une corde autour du menhir, mais rien n’y fit, la pierre ne bougea pas.
N’ayant pas réussi à la faire tomber, le propriétaire dut se résoudre à la laisser à sa place initiale. Sur un point de la commune de Veyreau situé à deux kilomètres au sud-est de Vessac, des restes de murs, des tuiles à rebord et des fragments de poteries sigillées de la Graufesenque signalés par M. Lanza marquent l’emplacement d’un habitat gallo-romain. (Gallia, année 1974, volume 32).
Revenons au village actuel. Ses maisons ont conservé leurs caractères caussenards : maisons basses et trapues, en voûtes, toits de lauzes, murs très épais (Bergeries).
H. de Barrau en 1857 écrivait sur Vessac, qu’il s’agissait d’un « village de 25 à 30 maisons qui n’avait pas de château. C’était un fief ancien et considérable dont la famille de Malhac prit le nom et qu’elle fit même ériger en baronnie dans le courant du XVIIIe siècle, époque de sa prospérité. » (Documents historiques et généalogiques, p. 511).
Jeanne de Frottard, qui épousa en 1561, François de Malhac, lui apporta en dot la seigneurie de Vessac et coseigneurie de Cantobre, de Roquelongue et de Saint-Véran, situées sur le Causse Noir.
Un de ses descendants, appelé aussi François de Malhac né à Nant le 11 juillet 1622, se marie à Jeanne de Granger le 27 août 1645, puis avec Madeleine d’Alboy le 30 avril 1656, enfin avec Marie Thérèse de Caissac de Sédages le 10 avril 1661. Il rédige son testament le 1er octobre 1676 instituant Pierre de Malhac son fils comme héritier. Il décèdera un dimanche 26 juin 1678 et sera enterré le jour même à Nant. Son acte de décès mentionne « Noble François de Malhac, seigneur de Bessac »
A cette époque le plus riche propriétaire de Vessac était Nadal Arnal qui paye le plus d’impôt en 1666 dans la paroisse de Saint-André avec 33 l. (Compois). Pierre de Malhac fils de François seigneur s’intitule « baron » de Vessac le 28 septembre 1690 (Aigouy, notaire), il épouse Marie de Roux de la Loubière le 7 novembre de la même année.
Nous savons que les habitants du hameau doivent moudre au moulin de Corp, attendre deux et même trois jours à la porte d’un moulin dépourvu d’eau ; et accepter de la mauvaise farine. A propos des fours de Vessac et du moulin banier de Corp, les habitants de Vessac soutinrent un procès qui dura 26 ans contre le seigneur de Montméjean. Le seigneur veut leur faire démolir les fours construits sans sa permission à Vessac et les obliger d’aller moudre à Corp (1684 -1710).
Le seigneur finit par triompher, les habitants de Vessac reconnurent la vérité et la justice de la banalité. Le seigneur vu la difficulté des chemins dispense les habitants de la banalité moyennant la rente annuelle de 9 l. payable annuellement au château. Ils reconnaissent de même la justice et vérité de la banalité des fours établie par la transaction de l’année 1608 et promettent aux seigneurs de payer la rente annuelle de 10 cartes froment.
Le Seigneur se réserve de faire démolir les fours construits depuis 30 ans. Les dépenses exposées par ledit seigneur à raison de la banalité des fours demeurent amiablement réduites et modérées à 777 livres soit 37 livres pour chacun des 21 habitants de Vessac. (Duranc).
Pierre de Malhac testa le 30 août 1711 en faveur de Marie de Roux sa première femme, laissant pour fils Jean-Baptiste, dernier « seigneur baron » qui prit sa succession.
Jean Baptiste de Malhac dernier « seigneur baron » de Vessac se mariera le 23 février 1723 avec Marie Anne de Levezou, puis le 18 février 1732 à Marguerite de Jouery, fille de Raymond, secrétaire du roi, seigneur de Brussac, et de Marguerite de Nègre. Il n’y eut de ce mariage que deux filles: l’une d’elles, Elisabeth-Marguerite, épousa Jean-François Jouéry, seigneur de Belcayre, lieutenant criminel, et mourut sans enfants, le 19 avril 1816, à l’âge de 84 ans. L’autre, Marie-Monique de Malhac, plus connue sous le nom de Mademoiselle de Vessac, restée fille, est décédée à Rodez, le 22 décembre 1820, âgée de 82 ans.
Le dernier « seigneur baron » quitta Vessac pour Nant en 1733. Sur ses vieux jours, il alla habiter Rodez où il testa un soir du 23 mai 1783, et mourut en 1785. Il avait depuis longtemps aliéné tous ses biens. La coseigneurie de Peyrelade fut vendue par lui en 1747, à Jean Pourquery du Bourg, fils de Pierre, avocat au parlement; la seigneurie de Vessac, à Jean-Antoine Roussillon, bourgeois de Navas, le 19 mars 1763; le fief de Muret (aujourd’hui disparu) et ses dépendances à Jacques Bion , seigneur de Marlavagne, le 5 juillet de la même année, et enfin le 15 janvier 1773, la terre de Beauvoisin, à M.André Liquier, oncle, négociant de Marseille, pour le prix de 65 000 livres.
Entre 1718 et 1731, Vessac comptait vingt maisons habitées tandis que Saint-André en possédait 40.
Si Vessac n’avait pas de chapelle, elle avait un prêtre puisque celui-ci donne 10 l. en 1590 pour réparer l’église de Saint-André endommagée pendant les guerres de religion, et semble-t-il un oratoire, la croix du Louradou (1666) est là pour nous le rappeler : située au lieu dit « quatre chemins de Vessac ». Louradou pourrait rappeler qu’en ce lieu a existé un oratoire, table monolithe biseautée, croix de pierre. L’oratoire aurait été détruit lors de l’aménagement de la route en 1873.
Une autre croix fut érigée en 1826 dans le village de Vessac puisque « Le 27 septembre Monseigneur Lalande évêque de Rodez accorda 40 jours d’indulgence à tous ceux qui feraient dévotement quelque petite prière devant la croix de la Mission de Saint-André et de même devant la croix de Vessac planté à la même époque et à la même occasion » (Blanc curé).
Croix en bois vétuste qui fut remplacée par une en pierre que les habitants de Vessac avaient plantée au milieu de leur village le 15 juin 1851 et qui fut bénie par le curé Guibert de Saint-André. Le livre de Paroisse nous apprend que « pour suffire aux frais de cette croix on a fait une quête dans ledit village. »
C’est au milieu du XIXe siècle, que Vessac connut le plus de prospérité. On y comptait 73 habitants en 1868. Une école y fut même créée en 1883. En 1888, on dénombrait 22 élèves. Cette école mixte fut déplacée dans le village en 1913 parce que son précédent emplacement était malsain, insalubre, humide (délibération communale du 2 mars). En 1920, lors de la rentrée, les quinze enfants de l’école de Vessac sont privés d’instituteur, le conseil municipal prie le préfet d’en trouver un (délib. communale du 3 octobre). Suite à la Grande Guerre et l’exode rural, il fut décidé en 1926 de supprimer « temporairement » l’école « compte tenu du petit nombre de familles du hameau de Vessac et des enfants aptes à fréquenter cette école » (délibération du 26 septembre).
Mais en 1942 « Vu la distance de Saint-André à Vessac, le mauvais temps en hiver, le manque de chaussures, la difficulté de ravitaillement, le nombre d’enfants en âge de scolarité (11), l’existence de l’ancien local à louer et le logement de l’instituteur, la commune approuve la réouverture de l’école mixte de Vessac. » (18 octobre). En 1959, de nouveaux aménagements à l’intérieur de l’école furent entrepris.
Roquefort fit construire une grande laiterie dans laquelle il y avait une immense citerne où on allait chercher l’eau. Notons que jusque là il existait une baume-fromagère, grotte aven signalé sur la carte IGN au sud du village. Son nom de fromagère lui vient qu’elle servit anciennement de cave à fromage de ferme. Gaston Libourel au cours d’un entretien (22 janvier 2004) me disait qu’encore « au XIXe siècle, elle était utilisée ». La carte I.G.N la mentionne sous le nom de « grotte aven ».
En 1906, Vessac comptait encore 72 habitants (12 ménages). Parce qu’il était « éloigné de 4 km de toute boîte aux lettres, et que 2 fois par jour le facteur de relais desservant Veyreau traverse ce village qu’il dessert, le conseil municipal est d’avis : qu’une boite aux lettres soit concédée à la commune de Saint-André pour être placée au village de Vessac sur la maison de M. Massol laitier et que la levée de cette boite une fois posée soit faite chaque jour, au passage du facteur de relais desservant Veyreau lorsqu’il va prendre le paquet qui lui est délivré à St-André-de-Vézines. » (Délibération communale 24 juin 1906). Plus tard, on installa le téléphone à Vessac chez la famille Libourel (poste de téléphone renouvelé en 1965). En 1972, sur la vingtaine de maisons qui existaient jadis, seules six étaient habitées. L’éclairage public fut installé en 1974.
Aujourd’hui, il ne reste plus à Vessac qu’une exploitation agricole, les résidences secondaires occupent le reste du village. Vessac est sur le passage de La Caussenarde, épreuve de V.T.T. Afin de permettre cette manifestation, l’ancien chemin de Saint-André à Meyrueis fut débroussaillé par les soins des communes de Saint-André et de Veyreau. Les terres de Vessac intéressent aussi les spéléologues : suite à l’orage du 20 au 21 septembre 1980, des avens se sont ouverts, souvent en plein champ. Un des plus connus est l’Aven des Patates.
En 1974, M. Libourel de Vessac en avait remarqué l’entrée. Le four communal a été restauré récemment par les soins de la commune. Le 15 août 2009 a eu lieu l’inauguration de la réfection du four communal, et c’est devant un large auditoire que M. le Maire Robert Lapeyre a pris la parole, entouré du conseil municipal et accompagné d’Alain Marc, député, Danielle Vergonnier, conseillère générale, et de M. Simonin, de l’association Remparts. Le four est depuis rallumé à plusieurs reprises en périodes estivales.
Marc Parguel