Patrimoine

D’où vient le nom « Aguessac » ?

La recherche de son sens ne relève pas seulement de la curiosité ; elle est fort instructive tant pour l’histoire, les progrès de peuplement, l’agriculture et la vie sociale.

Le nom d’Aguessac avait un sens dans la langue de ceux qui l’ont créé. Pour en retrouver son sens, il faut considérer successivement les formations dans chacune des langues ci-après : le latin, la langue romane, l’occitan, le français.

Le latin

Période d’utilisation du Ier siècle av. J.-C. au Ve siècle, apporté en Gaule par les Romains, ayant subi l’influence des langues germaniques. Le latin n’avait que lentement supplanté le gaulois, dont l’influence s’est fait longtemps sentir dans le nom des lieux. Une partie considérable de nos noms de lieux date de la période gallo-romaine. La meilleure preuve de l’origine individuelle en Gaule résulte des noms propres en –iacus qui, pour le plus grand nombre, dérivent de nom de gentilices romains, et durent être, à l’origine, des noms de fundi ou de propriétés immobilières. La mise en valeur du sol s’inscrit sur la carte avec les nombreux noms de domaines, suivit en général du suffixe gaulois latinisé –acum ; prototype d’innombrables toponymes en –ac (région du Midi de la France). Dans les pays d’oc, l’a de -acus s‘est maintenu, et la forme vulgaire de cette terminaison est –ac. Ces domaines gallo-romains ayant souvent formé le cadre des premières paroisses, nombreux sont ces lieux qui furent christianisés.

La définition donnée par Albert Dauzat, dans le « Dictionnaire étymologique des noms de lieux en France » est la suivante :

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Aguessac : (Aveyron), Acatiacum, du nom d’homme latin Acatius (variante : Acacius et suffixe : acum).

Acatius était-il donc un personnage gallo-romain qui s’installa au début de notre ère au confluent du Tarn et du Lumensonesque et fonda son domaine Acatiacum ?

La Graufesenque était un centre de fabrication très actif, dont les produits sigillés rayonnaient dans la Gaule entière et dans toutes les provinces de l’Empire avoisinant la Gaule: Italie, Suisse, Autriche, Allemagne, Hollande, Angleterre, Ecosse, Espagne et Afrique du Nord. Les poteries de la Graufesenque se rencontrent dans toutes les régions de la France, au Midi, au Centre, au Nord et à l’Est. Dans le département de l’Aveyron, elles sont disséminées dans un grand nombre de localités sur les bords du Tarn, en amont et en aval de Millau, sur le plateau du Larzac et sur le Causse Noir.

On trouve à Aguessac, quand on creuse le sol assez profondément, des monnaies romaines et des fragments de poterie gallo-romaine.

Argeliez dans : « Histoire et statistique de la vallée du Tarn » donne une tout autre définition de l’origine du nom du village d’Aguessac. « Le nom d’Aguessac dérive peut-être du mot latin aqua-situ, qui veut dire situé sur l’eau ou près de l’eau. On sait que ce village est placé sur le bord du Tarn qui vient battre ses murs et au confluent d’un ruisseau qui le baigne dans presque toute sa longueur ».
Nous ne retiendrons que la définition donnée par Dauzat A.

La langue romane

Période d’utilisation du VIe au IXe siècle, elle dérive du latin, c’est l’époque franque.
Après l’écoulement du Ve siècle, l’empire est morcelé, et chaque région se repliât sur elle-même et vit à part : la Gaule s’isole de l’Italie, comme de l’Espagne, en attendant la coupure qui, pendant quelques siècles, séparera le Midi du Nord et opposera, par suite, langue d’oc et langue d’oïl. Le vaste territoire où le latin vulgaire s’était maintenu se scinda à son tour. Les caractères respectifs se manifestent à la fin de l’époque carolingienne dans les premiers textes en langues vulgaires, et même à travers les textes latins de l’époque dans la transcription des noms propres.

Les francs ont, généralement, conservé les anciens noms, le type de désignation le plus fréquent est purement roman.

Acatiacum en latin, devient alors Araciaco Vico puis Agazsac en langue romane.

L’occitan

Appelé couramment le patois, l’occitan existe depuis le Xe siècle, il dérive de la langue romane. Nous pouvons distinguer deux périodes pour ce parler.

+ L’ancien français de 987 à 1328 (de Hugues Capet à Philippe de Valois)
Agazsac en langue romane devient alors Agassac en ancien français.

Le « z » latin transcrivait une lettre grecque dont la valeur était « dz » ; le son « s », pour « z » entre voyelles, s’est développé tardivement dans la langue latine.

+ Le moyen français de 1340 à 1610 (de la guerre de Cent Ans aux guerres de religion)
Pas de nouveaux types de formatin parmi les noms de lieux, en dehors des manoirs de plaisance, qui deviennent plus nombreux au XVIe siècle, avec des appellations créées par le propriétaire.

Pour les domaines ruraux, ont revient aux dérivés à l’instar de l’époque latine, mais avec des suffixes nouveaux, ajoutés au nom du possesseur.

Agassac en ancien français devient alors Aguassacus, Aguessacus, Villagus Aguessaci en moyen français.

Le français

Pour nous qui nous situons dans l’Occitanie, le français est une langue d’importation récente, elle ne s’est introduite qu’au XVIe siècle et n’a pas fait disparaître la langue locale: l’occitan.

Nous distinguerons deux périodes pour cette langue :

+ Le français classique de 1610 à 1789 (de Louis XIII à Louis XVI : la période bourbonienne)
Les noms de lieux sont en partie stabilisés. Aguassacus, Aguessacus, Villagus Aguessaci en ancien français alors Aguesac en français classique.

+ Le français moderne de 1789 à 1914 et contemporain de 1914 à nos jours
De nouveaux lieux de plaisances sont dénommés, ainsi que des fermes et domaines.
Parmi ceux-ci, se développe, suivant la région, avec le nom du propriétaire, un collectif.
Pas de grand changement dans l’orthographe du nom de notre village.

Aguesac en français classique devient alors Aguessac en français moderne et contemporain.

Claude Trémolet

Source d’information :
– Dauzat A. : « Les étapes de la langue française »
– « Dictionnaire étymologique des noms de lieux en France »

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