Causses et vallées

Le pont de Paulhe

Le pont métallique de Paulhe permet à la route départementale 506 de franchir la rivière du Tarn. Il relie le village d’Aguessac distant d’un kilomètre. Inauguré en 1882, il a bénéficié d’une rénovation au printemps 2014. Voici son histoire.

Jusqu’au milieu du XIXe siècle, seuls les bacs permettaient de passer l’eau à Paulhe, à la Cresse, à la Muse.

Sauf oubli, la première proposition de construire un pont à Lumenson pour remplacer le bac est de 1834 (Délibération communale de Paulhe du 6 juillet 1834). Le 19 février 1836, un arrêté relatif au projet d’un pont fixe a construire sur le Tarn, entre les communes de Paulhe et d’Aguessac, au-dessus de Millau, dans l’emplacement du bac de Paulhe, dit de Lumenson est pris par la préfecture de l’Aveyron.

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Quel genre de pont ? Le conseil est appelé à délibérer sur deux projets : pont en pierre avec arches dans le lit de la rivière Tarn qui coûterait 46 000 francs ou un pont en fer suspendu qui coûterait 41 976,84 fr. Les souscriptions se montent à 37 500 francs et le conseil général a accordé un secours de 2000 fr.

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Compeyre et Aguessac refusent de contribuer disant que toute dépense doit être payée par ceux qui en profitent quoiqu’ils aient plus de 40 familles de leurs habitants qui ont des propriétés dans la commune de Paulhe auxquels cette communication est indispensable.

Paulhe se prononce pour le pont suspendu, car le pont en pierre aurait mis en péril les terrains des riverains immédiats de la rive droite, en cas de crue, et vote le tarif des droits du péage : Un piéton 0 fr15 c, un cavalier 0.15, un cheval chargé ou non 0, 125, une ânesse ou âne 0, 1075, un cheval, bœuf, etc., allant au pâturage 0,05,bœuf ou vache destinés à la route 0,65, moutons chèvres brebis 0,025, charrette chargée à un cheval 0,40, à deux chevaux 0,60, à trois chevaux 0,80, charrette vide 0 fr 75 centimes.(Délibérations 1836)

Le 30 avril 1838, le roi Louis Philippe autorise la construction du pont suspendu sur le Tarn en remplacement du bac. Sa mise en service devait avoir lieu dans les 18 mois qui suivirent, mais Paulhe ne paye que 3000 francs d’impôt foncier. Les 2000 francs accordés par le Conseil général sont annulés… le secours de l’Etat est refusé. Paulhe doit renoncer à tout projet faute de moyens. On demandera l’autorisation à l’administration de construire un pont fixe de 3 mètres de large (9 avril 1839), mais ceci restera sans suite…

Trente ans s’écoulèrent avant que ne soit à nouveau projeté la construction d’un pont métallique entre Aguessac et Paulhe, à 6 km au Nord Est de Millau au début de 1869 (Echo de la Dourbie du 2 janvier 1869). La guerre de 1870 retarda sans doute cette dernière construction.

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Dans sa séance du jeudi 24 août 1876, le Conseil général de l’Aveyron, sous la présidence de M. de Bonald évoque :

« Après un rapport de M. Mazenc, le Conseil fixe la répartition des subventions de l’Etat pour les chemins vicinaux ordinaires et de moyenne communication. Le même rapporteur propose de ne pas prendre en considération une demande de la commune de Paulhe, tendant à obtenir une part des subventions de l’Etat pour la construction d’un Pont qu’elle se propose d’établir sur le Tarn. M. Bonhomme appuie la demande de la commune de Paulhe.

Il expose les difficultés que crée aux habitants la destruction de cet ouvrage d’art (il s’agit du pont de la Cresse) et demande au conseil de vouloir bien examiner s’il n’existerait pas d’autre moyen de venir en aide à une population aussi intéressante, autrement que par les ressources restreintes des chemins vicinaux.

M. Clausel de Coussergues fait observer qu’il y aurait un minime intérêt pour la commune de Paulhe, à participer aux fonds de secours du département. L’ouvrage qu’elle se propose de construire est évalué à 120.000 francs et ce ne sont pas quelques centaines de francs qu’elle pourrait obtenir, qui lui faciliteraient le moyen d’entreprendre ce travail. Il pense que cette commune devrait faire tous ses efforts pour arriver à une entente avec celle de la Cresse, qui est sur le point de construire un pont sur la même rivière à quelques kilomètres de distance.

Elle pourrait réclamer aussi le concours de l’administration qui pourrait, peut-être intervenir utilement dans l’intérêt des deux communes. Sous le bénéfice de ces observations, les conclusions du rapport sont adoptées » (Journal de l’Aveyron, 29 août 1876)

Il faudra attendre 1880 et la construction de la gare d’Aguessac sur l’autre rive droite du Tarn, pour que l’administration supérieure autorise la construction d’un pont au sud de Paulhe. La construction de ce pont métallique se fit dans la continuité de celui de La Cresse (1879-1880) et les travaux commencèrent en 1882, les deux ouvrages étant du même type. Albert Carrière nous apprend que le pont en fer de Paulhe coûta environ 54.000 francs (Monographie de Compeyre, Aguessac, Paulhe,1934).

Février 2014 ©DR

Le sieur Jean Agalède exploita le service du bac de Lumenson jusqu’à la mise en service du pont de Paulhe. Ainsi il en fut le dernier batelier. Ce bac fut supprimé par décision ministérielle le 19 avril 1887.

Le développement des voies de communication terrestre consécutives à l’extension du commerce entre les villages, départements et régions (bois, vin, etc.) favorise la construction des ponts pour franchir les rivières et de ce fait a entraîné la disparition des bateliers (d’après les Chronique Nagassole, Claude Trémolet)

Bien souvent, la rivière capricieuse du Tarn a ébranlé les terres autour du pont.

« En 1892, vendredi 10 juin, à 2 heures du soir dans la salle des adjudications à l’Hôtel de la Sous-préfecture de Millau, aura lieu l’adjudication de la reconstruction du chemin vicinal ordinaire n°3 d’Aguessac à Paulhe, partie comprise entre le pont sur le Tarn et la gare d’Aguessac sur une longueur de 223m84. La mise à prix est de 11500 francs, y compris une somme de 1066 fr.01, à valoir pour dépenses imprévues » (Journal de l’Aveyron, 10 juin 1892).

Du 3 février au 30 mai 2014, ce vénérable pont en fer a été « emballé » pour se refaire une beauté. Il a retrouvé une nouvelle jeunesse, grâce à une réfection complète de sa peinture.

Marc Parguel

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