Si les premiers mois du conflit, et notamment août et septembre, sont les plus meurtriers de la Première Guerre mondiale (301.100 tués en 5 mois), le Service de Santé de l’Armée est confronté, dès le début du conflit, aux très graves difficultés engendrées par un afflux massif de blessés et de malades. Du 2 août au 31 décembre 1914, près de 800.000 blessés et plus de 300.000 malades en provenance du front doivent être pris en charge.
Mission qui semble impossible. Pour faire face, dans toutes les villes desservies par une gare, il va être créé dans des locaux réquisitionnés où peuvent être installés au moins 20 lits (collèges, couvents, casernes, hôtels, etc.) de nouveaux hôpitaux : les « Hôpitaux Temporaires » appelés plus tard « Hôpitaux Complémentaires ».
Mais les services sanitaires de l’Armée sont dépassés par l’ampleur des problèmes. Ils n’arriveront pas à les juguler avant la fin de l’année 1915. En conséquence, dès le début de la guerre, il est fait recours à la Croix Rouge. Cet organisme sanitaire parallèle, bénévole et efficace va assurer d’août 1914 à juillet 1915 la majorité des soins aux soldats blessés et malades.
En effet, si l’organisation et la montée en puissance des services sanitaires n’a pas été la préoccupation majeure de l’Etat – Major, au contraire, les trois sociétés qui composent la Croix Rouge se préparent depuis des décennies à soutenir le Service de Santé de l’Armée.
Ces trois sociétés ont pour appellation :
• la Société française de Secours aux Blessés Militaires (S.S.B.M.),
• l’Union des Femmes de France (U.F.F.),
• l’Association des Dames Françaises (A.D.F.),
Elles vont créer et diriger des hôpitaux auxiliaires avec le personnel soignant nécessaire, où se remarquent notamment des religieuses infirmières qui avaient été chassées des hôpitaux publics en 1905 !
A la déclaration de guerre, le 2 août 1914, il n’y a, à Millau qu’un seul hôpital qui peut accueillir les blessés de guerre : l’Hospice civil et mixte situé au n° 48 du Boulevard Richard.
Existant en temps de paix, il appartient à la catégorie d’établissements appelés « Hôpitaux Mixtes » où les militaires et les civils de la ville sont soignés dans des salles différentes. Comme il n’y a que 24 lits dans la partie de l’hôpital réservée aux militaires, en raison du nombre important de blessés qui vont arriver du front, il va être créé le 14 septembre 1914 par deux des trois Sociétés de la Croix Rouge, les « Hôpitaux Auxiliaires » (HA) ci-après :
– l’HA n° 106 au Collège de Jeunes Filles, rue du Barry, disposant de 60 lits. Il est géré par l’U.F.F. : « L’Union des Femmes de France ». Cet hôpital fermera le 19 décembre 1918.
– l’HA n° 19 au Collège de Garçons, 16 boulevard de l’Ayrolle, d’une capacité de 60 à 80 lits. Il est dirigé par la S.S.B.M. : « Société de Secours aux Blessés Militaires ».
Le nombre de lits étant insuffisant pour faire face aux arrivées massives de blessés, il est aménagé au cours de l’année 1915 deux annexes à l’HA n° 19 par la S.S.B.M. et créé un autre hôpital auxiliaire par l’U.F.F. :
– le 22 janvier 1915, dans l’Institution Sainte-Marie (voir les deux clichés ci -dessous) 10 boulevard Sadi Carnot, 40 à 52 lits,
– le 1er octobre 1915, dans l’école du Sacré-Cœur, 37 rue du Barry, 40 à 48 lits,
– le 19 mars 1915, l’HA n° 107 dans l’Etablissement Saint-Joseph, 3 rue de la Pépinière, 40 lits. Il fermera le 30 janvier 1917.
L’HA n° 19 va fonctionner au Collège de Garçons jusqu’au 7 février 1918, date à laquelle il sera rendu à l’enseignement public. Il a accueilli 1836 soldats blessés et malades. Deux sont décédés. Le Médecin-chef Castagnié était assisté par les médecins Verdier et Lavabre.
Après avoir augmenté leur capacité à 100 lits, les deux annexes de l’hôpital auxiliaire HA n° 19 vont poursuivre leurs activités jusqu’à la fin de la guerre et ne fermeront qu’en décembre 1918, l’Institution Sainte-Marie, le 18 et l’Ecole du Sacré-Cœur le 19.
L’Hôpital civil ne sera plus mixte à partir du 30 juin 1919.
Durant les périodes où les six établissements hospitaliers étaient en activité, le nombre des lits réservés aux soldats blessés et malades variait entre 260 et 300.
Il convient d’ajouter que plusieurs agglomérations aveyronnaises ont contribué à l’effort national pour accueillir les militaires blessés et malades.
En effet, sans compter les annexes et les établissements ouverts pour les convalescents (OAC), il a été créé les hôpitaux auxiliaires (HA), bénévoles (HB) et complémentaires (HC) ci-après :
• à Decazeville : les HA n° 17 et HB n° 82 bis,
• à Espalion : l’HB n° 56 bis,
• à Le Gua : l’HB n° 57 bis,
• à Rodez : les HA n° 11, HC n° 21, n° 22, n° 23, n° 30 et n° 32,
• à Saint-Affrique : les HA n° 22 et n° 122,
• à Tournemire : l’HA n° 23,
• à Villefranche-de-Rouergue : l’HA n° 14,
• à Villeneuve : les HA n° 26 et HB n° 72 bis,
• à Viviez : les HA n° 7 et n° 30.
En conclusion, pendant toute la durée de la guerre, grâce aux établissements ci-dessus et aux hôpitaux publics existants, l’Aveyron a été en mesure de mettre à la disposition du Service de Santé de l’Armée plus de 2500 lits.
Bernard Maury
Avec mes remerciements à Jean-Marie Lacour et Pierre Costecalde