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Millau. Aux Cheveux d’Ange, une déléguée syndicale en procédure de licenciement

« Je travaille de nuit », explique Edith, aide-soignante à la résidence mutualiste les Cheveux d’Ange depuis 2011. « Une nuit, la directrice et la directrice adjointe de l’Union des Mutuelles Millavoises, qui gère les Cheveux d’Ange, sont arrivées, pour contrôler la charge de travail que l’on avait. Il était minuit, j’étais en pause, assise sur un fauteuil. On me reproche depuis d’avoir abandonné mon poste de travail. »

C’était le début des ennuis pour cette aide-soignante de 54 ans, employée aux Cheveux d’Ange depuis 2011, qui soupçonne la direction de vouloir la licencier en raison de son statut de déléguée syndicale CGT. Une série d’ennuis qui l’ont menée jusqu’à être convoquée à un Comité Social Economique (ex-comité d’entreprise) extraordinaire cet après-midi, en vue de son licenciement.

Une trentaine de sympathisants étaient réunis devant les locaux de l’UMM au moment du C.S.E.

« Etrangement, à partir du moment où elle a été élue, en juin 2018, son travail ne satisfaisait plus sa direction », dénonce Céline Tabariès, secrétaire de l’union locale de la CGT à Millau, venue la soutenir, en même temps qu’une trentaine de syndicalistes CGT de tout le département.

« Depuis cette date, elle n’a de cesse de faire son travail d’élue en portant les revendications de ses collègues auprès du grand patron, M. Haon. La direction refuse tout, même ce qui est réglementé par le Code du travail. Par exemple les Négociations annuelles obligatoires (NAO), qui se passent chaque année dans les entreprises. Mais pas aux Cheveux d’Ange ! Non, aux Cheveux d’Ange, on ne négocie pas, on impose. Il y a eu d’autres tentatives d’Edith, toujours au nom de ses collègues et sous son mandat syndical, mais sans résultat. »

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Face à ce « dialogue social qui n’existe pas », pas plus que « le dialogue tout court », le 12 juin 2019 la majorité des salariés sont en grève, et manifestent devant les locaux des Cheveux d’Ange.

Un « climat malsain » au sein des Cheveux d’Ange

« M. Haon n’était pas sur place et il a laissé sa directrice seule devant les salariées, explique Céline Tabariès. Les salariées qui avaient d’ailleurs déposé un préavis de grève alors qu’elles n’étaient pas obligées, pour protéger les résidents en pensant qu’avertie sept jours avant, la direction prendrait des mesures et réquisitionnerait comme la loi le stipule. Mais non, M. Haon, jugeant le mouvement marginal et pensant que seulement deux ou trois personnes seraient en grève, n’avait rien fait de cela ! Après notre demande de faire venir M. Haon sur le site pour négocier, il est arrivé et… nous a fait un bras d’honneur. Oui, un bras d’honneur, un peu particulier comme amorce du dialogue non ? »

Céline Tabariès, secrétaire de l’union locale CGT de Millau.

Après une journée de grève « où dès le départ M. Haon avait dit qu’il ne céderait pas face à la pression du syndicat », les manifestants ont vu la totalité de leurs revendications accordées.

Une joie de courte durée, puisque selon les syndicalistes, « quand les salariées sont rentrées du conflit, certaines, le soir même, ont trouvé une lettre du docteur coordinateur du site qui était d’un mépris effroyable. Il parle d’abandon de poste alors que c’est M. Haon qui n’a pas pris ses responsabilités en mettant en place des réquisitions. »

Et de dénoncer le « climat malsain » qui a suivi. « Deux infirmières ont été agressées verbalement et physiquement par une psychologue du site, affirme Céline Tabariès. Des mots ont été dits comme « mal baisées ! », « salopes ! »… Les deux infirmières sont alors allées se plaindre à Mme Besombe, leur directrice. Mais Mme Besombe a validé cela en disant que c’étaient elles qui avaient commencé. Alors aux Cheveux d’Ange, on valide une telle violence sans rien faire ? Les deux infirmières ont été convoquées pour un entretien préalable au licenciement pour faute grave. »

« Bon nombre de choses qui avaient été signées lors du protocole de fin de conflit n’ayant pas été respectées », Edith, toujours sous étiquette de déléguée syndicale, écrit une lettre recommandée à M. Haon en lui demandant de bien vouloir respecter le protocole de fin de sortie qui avait été signé.

Lors d’une assemblée extraordinaire à laquelle tous les salariés étaient conviés, « M. Haon a pris personnellement Edith à partie, en faisant carrément et simplement un lynchage. Il a cité plusieurs fois Edith en disant qu’elle avait écrit une lettre calomnieuse, alors qu’elle demandait juste, au nom de tous les salariés, que ce qui avait été signé soit respecté », rappelle Céline Tabariès.

Suite à cette assemblée, Edith a été convoquée pour un entretien préalable au licenciement. Puis aujourd’hui avec la convocation du CSE qui doit être consulté sur son licenciement.

« Je travaille ce soir… »

Un CSE qui a duré une heure environ, et duquel Edith est sortie soulagée. « Il y a eu trois votes défavorables à mon licenciement, et une abstention », se réjouit-elle. Un résultat attendu puisque sur les quatre délégués, trois sont syndiqués, dont elle-même qui a pris part au vote…

C’est désormais à l’Inspection du Travail de trancher, dans un délai de deux mois. « Et n’en déplaise à M. Haon, la loi autorise à saisir la Direccte pour défendre ses droits », prévient Céline Tabariès…

En attendant, cette nuit, Edith va reprendre son poste, comme d’habitude. « Je travaille ce soir, et je travaillerai jusqu’au bout. Je ne veux pas leur donner l’occasion de me mettre à pied… »

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