Le Viala-du-Pas-de-Jaux, dont le nom viendrait de « Passus Jovis » accolé à celui de Viala (Villa) semble indiquer que près d’ici passaient les pèlerins venant du Cros, Saint Michel d’Alajou, Saint Félix et le Caylar et se rendant en empruntant le pas (le lieu le mieux choisi pour franchir l’escarpement des falaises) sur la montagne de Montjaux (Mont Jovis) adorer le Dieu Jupiter.
« Vialar en occitan, donne Vialarenc, nom des habitants et Jous (Jupiter) comme par exemple dijoùs (jeudi), jour de jupiter » (d’après Jean Virenque, En parcourant le Larzac, 1974)
Le Viala-du-Pas-de-Jaux a été donné aux Templiers en 1150 par le seigneur de Tournemire. A cette époque, le Vialar, comme on dit alors, n’est constitué que de quelques exploitations agricoles disséminées sur le territoire de l’actuelle commune du Viala. Après 200 ans d’existence, l’ordre du Temple est aboli en 1312 par le pape Clément V après l’arrestation de tous les Templiers du royaume par Philippe le Bel qui les accusait d’hérésie. Jacques de Molay, dernier maître du Temple monte sur bûcher le 18 mars 1314 après quoi les Hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem récupèrent les biens des Templiers.
Les Hospitaliers décident de créer en ce lieu un village et pour cela construisent les bâtiments d’une exploitation agricole qui sera gérée par les frères de l’ordre. Ils élèvent pour eux en 1315 le logis des chevaliers et construisent une église dédiée à Saint Jean Baptiste, le Saint patron des Hospitaliers. Jusqu’à cette date, les habitants du Viala se rendaient à l’église à Tournemire. En sollicitant l’autorisation de l’évêque de Rodez pour construire une église, les Hospitaliers cherchent à fixer durablement la population sur ce site afin d’y créer un village « Le Viala-du-Pas-de-Jaux ».
L’église bâtie de belles pierres bien assisées entièrement blanchie à l’intérieur sera entièrement détruite en 1873, le conseil municipal l’ayant jugé mal construite, mal aérée et trop exiguë. Elle fut agrandie pourtant en 1743 et mesurait 9,5 mètres de nef, pour une longueur totale de 18 mètres et une largeur moyenne de 4,60 mètres. On la disait malsaine parce que l’élévation continue du sol cimétérial, par apport de terre, afin de ne jamais bouleverser de sépultures, enterra le niveau bas de la nef, amenant humidité et infiltrations diverses sur une bonne hauteur de murs. Elle se situait à l’emplacement de l’église actuelle.
Le 12 mai 1861, le conseil municipal met sur la table, les problèmes liés à cet édifice : « Cette église, en contrebas du sol de plus d’un mètre, est d’une construction mauvaise, mal aérée et mal disposée pour le service public et le service du culte. Cet inconvénient est très grave, mais il l’est moins encore que l’insuffisance même de l’église qui, même dans les cérémonies ordinaires, peut recevoir à peine que la moitié de la population » (délibérations communales).
Mais ce n’est que le 22 juin 1873, comme le mentionne la revue Sauvegarde du Rouergue, qu’il y a adjudication pour la construction de la nouvelle église, d’une surface de 154 m2 contre 110 m2 pour l’ancienne (n°90,2006).
Le curé était alors Auguste Causse, né à Saint-Affrique en 1845, ordonné prêtre en 1865, curé du Viala en 1873.
C’est sous son apostolat que la nouvelle église vit le jour. Il mourut au Viala, le 1er janvier 1880 et repose dans le cimetière du village.
L’église fut terminée en 1875. La Revue religieuse du diocèse de Rodez nous fait part de sa bénédiction :
« Qu’il est beau et touchant le spectacle de la bénédiction d’une église ! C’est à une telle fête que nous venons d’assister dans la paroisse du Viala-du-Pas-de-Jaux.
Depuis longtemps la grande majorité des habitants de cette commune soupirait après le jour où il lui serait donné de contempler et de jouir d’un nouveau temple digne de la majesté divine, car la vieille église ne rappelait que trop, hélas ! l’étable de Bethléem pour ne dire rien de plus.
Pendant vingt années, le bon curé de cette paroisse, M. Antoine Cance (curé du Viala de 1855 à 1873), d’heureuse mémoire, s’occupa avec beaucoup de zèle de cette noble entreprise. Ce digne prêtre rencontra toujours des obstacles inouïs. Sans se décourager …il agissait sans cesse et priait… Quelques semaines avant son trépas, il eut la consolation de voir un plan d’église approuvé et donné à l’adjudication…Il prépara les matériaux du nouveau temple, laissant à son successeur le soin de continuer et d’achever son œuvre. Après quinze mois de construction, la paroisse du Viala possède enfin une belle église dans le style roman.
Cet édifice est bâti sur les ruines de l’ancien et une partie de l’ancien cimetière. M. Sabathier, vicaire général, plein de zèle et d’activité pour tout ce qui touche le service de Dieu, l’intérêt de l’église et le salut des âmes, et qui avait eu l’aimable charité de procurer pour ce nouvel édifice les autels et les statues qui le décorent, ainsi que plusieurs autres ornements, a bien voulu encore, sur la prière du pasteur, le bénir. Ce digne et vénérable grand-vicaire était entouré dans cette imposante cérémonie, d’une belle couronne de prêtres où l’on remarquait entr’autres avec bonheur M. Arnal, curé archiprêtre de Saint-Affrique et M. Vidal, curé de Saint-Rome de Tarn. Après la bénédiction de l’église, la foule impatiente a pu pénétrer dans ses murs pour assister au saint sacrifice et entendre la parole de Dieu. La messe a été chantée avec beaucoup d’harmonie et les chantres de la paroisse ont reçu des éloges bien mérités.
Le saint sacrifice de la messe fini, M. le vicaire général a pris la parole… Cette fête s’est terminée par la bénédiction du très Saint Sacrement et l’assistance émue s’est retirée emportant de cette auguste cérémonie un impérissable souvenir ». ( Article signé X… Revue religieuse du diocèse de Rodez, 9 juillet 1875).
Faute de moyens financiers, le clocher ne sera construit qu’en 1894. Entre temps deux autres curés se seront succédé : l’abbé Alexandre Montels qui sera nommé en 1880 avant d’être déplacé à Arques (Revue religieuse, 13 mai 1881), et l’abbé Costes Louis qui était vicaire à Roussenac et fut nommé curé du Viala l’année suivante (Revue religieuse, 25 novembre 1881) jusqu’en 1894 où il partit pour Saint Pierre des Cats, près de Brusque.
Depuis le Temple, la dédicace de l’église n’a jamais changé et continue à être celle de Saint Jean Baptiste, patron aussi des Hospitaliers, puis de Malte (Sauvegarde du Rouergue, n°31, 1991). Aujourd’hui, l’église est fermée au public, elle ne peut être visitée.
Marc Parguel