CIRCUIT C – VIEUX-MILLAU-OUEST (partie 1)
Face à la Trouée St Martin, cette maison bourgeoise est datée de 1886. Elle est aujourd’hui divisée en plusieurs appartements. Je me souviens d’une exposition d’objets de culte dans une salle lors du congrès eucharistique en juin 1953.
Le cartouche aux initiales du propriétaire AB, au centre d’un cuir aux bordures enroulées.
Au premier étage sur le linteau de la fenêtre, un visage féminin, à la coiffe bigoudène semble-t-il, surmonté de la coquille St Jacques laisserait supposer une origine bretonne de la Dame d’alors.
Le château de Sambucy trône, en retrait, au milieu du boulevard de l’Ayrolle. Il fut bâti dès 1679 pour le compte de Jacques Duchesne maître des Eaux et forêts en Rouergue sous Louis XIV ; Il échut par mariage à Marc Antoine- de -Sambucy en 1745. Ses intérieurs richement décorés et son jardin à la française – devenu parc à l’anglaise – lui valent d’être classé monument historique depuis 1943.
La Traverse de l’Ayrolle appelée en langage millavois « bolto de Pountillado », des petits ponts, à cause de ses arcs de soutènement est typique du vieux Millau par son étroitesse et partant du manque de lumière à l’égal de la rue Etroite.
Arc demi-cintre et passage voûté menant au cul-de-sac de la traverse.
Au n° 1 de la Traverse de l’Ayrolle, une porte à l’encadrement très érodé, témoigne d’un âge fort avancé XV ou XVIe s.
A l’angle des rues Droite et Peyrollerie, au 1er étage de l’ancienne épicerie Grégoire, un moignon de l’art statuaire pourra longtemps alimenter des hypothèses : gargouille, base de statue disparue, console d’éclairage, socle d’enseigne…
N° 4 de la rue Peyrollerie, porte dont l’encadrement accuse un âge avancé et où les armoiries ont disparu par l’usure du temps ou sous les coups des agités de la Révolution. Puisque nous allons descendre cette rue, autant la définir : la rue Peyrollerie (chaudronnerie) était habitée au XVe s. par ces artisans (payrouliers en langage de l’époque). M. J. Artières précise : « une ordonnance royale du 4 juillet 1461 obligeait les peyroliers à exercer leur métier dans cette rue ».
Comme le montrent plusieurs éléments d’architecture, la rue fut aussi habitée par des bourgeois et appelée « rue des Nobles ». Au n°10 à l’étage, l’une des deux fenêtres à moulures, fort heureusement restaurées, preuve que certains sont conscients de la valeur de leur patrimoine.
Le n° 13 de la rue Peyrollerie possède un portail monumental du XVIIIe s. bien conservé à l’exception de la corniche. Le linteau décoré d’un cœur de cordelières, ces derniers motifs repris en décoration de la porte par un menuisier très soucieux d’harmonie. La base des pilastres est protégée des roues de charrettes par des blocs de pierre appelés localement « bute-rode ». C’était l’entrée de l’hôtel de Gaujal, famille qui dura de 1772 à 1856 avec le décès du dernier membre : Philippe de Gaujal-Saint-Maur qui avait été maire de Millau en 1830, conseiller général et député. Cet immeuble cossu fut acquis par les notaires Sabatier. Il fut par la suite « propriété de l’Association diocésaine de Rodez et servit de presbytère pour les quartiers de Notre Dame et St Martin ».
Le n° 10 est très riche d’éléments architecturaux. Après avoir poussé le portillon, cette magnifique porte à pilastres cannelés dont l’entablement à modillons supporte la corniche hélas bien détériorée. Les pilastres doivent être de la récupération, car ils semblent bien courts et ont dû être rehaussés à leur base. Son propriétaire est très soucieux du patrimoine, la porte sera bien gardée !
Toujours au n° 10, dont l’entrée du courtil était autrefois l’un des accès au Château Royal, l’on a reconstruit avec de probables récupérations de la forteresse, telles ces fenêtres Renaissance du logis des vicomtes ou des capitaines-châtelains. Le château se situait entre les rues de l’Ayrolle, le passage du Concierge, les rues Peyrollerie et de l’Ancienne Tour. Il fut démantelé sur ordre du duc de Rohan en 1667 lors des guerres de religion.
Sur les deux fenêtres à meneaux, la plus haute a été tronquée, heureusement la plus basse a été préservée. Elle est typique du style Renaissance, rare témoignage en bon état de cette époque dans notre ville.
L’on peut regretter les tuyaux de descente d’eaux pluviales et usées qui enlaidissent la façade. (Voir photo précédente)
Au n° 17 de la même rue, voici une demeure ayant quelques similitudes avec celle du n° 13, dont les pilastres s’érodent sérieusement.
Détail d’un chapiteau engagé montrant par ses motifs végétaux et volutes une inspiration baroque, XVe et première moitié du XVIIIe s.
Le portail du n° 14 permet de pénétrer à la Traverse du Concierge. La percée de cette porte intérieure aux remparts fut autorisée en 1356 par les Consuls pour accéder au Château Royal, lequel jusqu’alors n’était desservi que par un passage extérieur sur pont-levis au-dessus des fossés. Les armoiries ont été bûchées en 1793. Aujourd’hui en passant sous le porche et quelques escaliers on rejoint le boulevard de l’Ayrolle.
En pénétrant sous le couvert du n° 20, une antique porte, peu mise en valeur par l’obscurité.
Porte monumentale du 25 rue Peyrollerie : maison de Rozier. Le baron De Gaujal dans ses
« Etudes historiques sur le Rouergue » nous parle de « Georges Rozier, conseiller du roi et président au bureau de l’élection de Millau, seigneur de Vabres et d’Argeliez, décédé en 1785… père de six enfants », dont l’un : Jean-Baptiste-Henri fut avocat et décédé à Millau. (conf. H. de Barrau dans « Histoire générale du Rouergue »).
Accolée au portail suivant et au même n° 24, une ancienne entrée du XVe s. transformée en fenêtre dont la partie supérieure est condamnée par une barre acérée que nous nommons « estripe-cat » (déchire-chat) !
La façade du n°43 est à la mode actuelle du « décrépissage » pour laisser les pierres apparentes. C’est d’un beau rendu, mais fautif ! Le crépi protège et évite l’éclatement des pierres marneuses sous l’effet de la pluie et des variations de température. Ici cependant ne boudons pas notre plaisir de voir les différents parements et matériaux, dont la reprise de construction du 1er étage, plus soignée, en lits réguliers de pierres.
La baie géminée du n° 55 a disparu en 1912 par la cupidité d’un acheteur d’antiquités (cf. article du Marc Parguel dans le J.M du 22/10/2012).
Pour nous consoler, la maison du n° 59 a cette belle baie mise à jour en 1970, qui serait du XIIe s. Elle était à l’origine formée de deux fois deux colonnettes accouplées supportant une série de trois arcs. Les impératifs de notre confort des temps modernes et de la finance font que l’on a dû l’aveugler et la tronquer.
Dans la façade rénovée de l’immeuble du n° 44 et au-dessus du passage, le propriétaire a sauvé cette figurine dans sa niche. Sa crosse tournée vers l’intérieur montre qu’elle figure un abbé (crosse dans l’autre sens et mitre pour un évêque). Dans ce secteur se trouvait au Moyen-Âge l’hôtel des Templiers qui appartint ensuite aux Hospitaliers, mais aussi la maison des moines de Bonneval ; alors qu’elle est l’identité de la statuette ? Dans « Un siècle d’images millavoises », l’abbé Vivier avance que cela puisse être une figuration de St Bernard, abbé de Clairvaux, dont Bonneval et les Templiers tenaient leur règle.